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Touwensa (Agences). Mokhtar TRIKI
Ce 16 octobre, Luc Besson inaugure son premier multiplexe «révolutionnaire», affirme-t-il. Implantées au bout des pistes de l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle dans le centre commercial d'Aéroville, ses douze salles concentrent toutes les innovations marketing et technologiques du moment. Pour y accéder, on passe par un tunnel immersif d'écrans LED avec des images et du son partout, y compris au-dessus de la tête.
«La traversée dure 90 secondes et permet de laisser le monde réel derrière soi», explique Christophe Lambert, bras droit de Besson et directeur d'EuropaCorp. Fauteuils numérotés, son Dolby Atmos, deux salles de luxe avec bar et service à la place. Une autre pour danser et accueillir des concerts. Un vaste hall libre d'accès à 360 degrés avec des écrans interactifs, une boutique et des bars proposant vin et champagne. «Nous prévoyons d'ouvrir huit à dix cinémas de ce genre d'ici cinq à sept ans, le prochain est prévu en 2015, à Marseille sur le port, explique Christophe Lambert. Selon la salle et le confort choisi, la sortie reviendra entre 10 et 25 euros. C'est une autre façon de voir le cinéma. Il faut ré enchanter l'expérience en salle.»
Luc Besson est loin d'être le seul à investir dans les salles obscures, à raison de 3 à 30 millions d'euros par cinéma. À Paris, quatre lieux futuristes ouvrent ces jours-ci : le PathéBeaugrenelle dessiné par le branché Ora-ïto, le magnifiqueUGC Cité Ciné Paris 19 de Jean-Paul Viguier illuminé tel lalanterna magica chère à Ingmar Bergman, le MK2Bibliothèque-BNF, avec une entrée signée Dominique Perrault et, enfin, deux salles de luxe privatisables au Palais de Tokyo. À Rodez, Agen, Chaumont, Crépy-en-Valois, Châtellerault, Sarrebourg, Guebwiller… Partout, des cinémas beaux et modernes sortent de terre. Et ce n'est qu'un début. «Deux cents autres sont en chantier», annonce Richard Patry, président de la Fédération nationale des cinémas français (FNCF). «Le mouvement s'accélère, confirme Éric Busidan, au Centre national du cinéma (CNC), qui autorise les ouvertures de multiplexes. De 24 demandes en 2010, je suis passé à 41 en 2011, 42 en 2012. Cette année, 33 dossiers ont été déposés.»
Apprivoiser le spectateur
Après le passage au numérique, qui est une réussite, puisque aucun cinéma n'a fermé en France, «nous tentons d'anticiper les désirs des spectateurs pour les dix prochaines années, explique Arnaud Vialle du Rex à Sarlat, en Dordogne. Rien n'est trop beau pour que le cinéma reste la pratique culturelle préférée des Français. Depuis un an, la fréquentation a chuté de 9 %, selon le CNC. «Le cinéma a encore un bel avenir dans les salles, estime cependant le sociologue Emmanuel Ethis. La question est de savoir comment on crée et on apprivoise les spectateurs de demain.» Les exploitants comme Marie-Christine Desandré du CinéA à Amboise se souviennent avec angoisse des années 1980 quand les Français ont déserté les salles à cause de la démocratisation du magnétoscope et de l'arrivée de Canal+. «Il a fallu attendre 1993 avec Les Visiteurs pour que le public les redécouvre », soupire Charles Mascagni du Régent à Saint-Gaudens, en Haute-Garonne.
Aujourd'hui, 70 % des Français vont au cinéma au moins une fois par an. Difficile de faire mieux. «L'enjeu est de faire revenir plus souvent les gens au cinéma, explique Hugues Borgia, directeur du développement des UGC Ciné City. La qualité des services, la diversité de la programmation, la proximité… tout est orienté vers cet objectif.» Bien sûr, les exploitants restent à jamais tributaires de la qualité des films. «Quand on va peu au cinéma, on attend beaucoup du film choisi, analyse Hugues Borgia. Si on est déçu, c'est une énorme déception. À nous d'effacer cet effet en donnant envie aux Français de venir régulièrement. Quand l'expérience ne se joue pas sur un seul film, la bonne expérience l'emporte sur la mauvaise.»
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