Pourquoi les Français ne gagnent plus Paris-Roubaix

Touwensa (Agences) Mokhtar TRIKI

La «Reine des classiques» échappe aux Tricolores depuis 1997. Dimanche, ils se draperont encore dans un rôle d’outsider.

257 km (dont 51,1 km de pavés). Une épopée hors du temps et des favoris classiques. Le Suisse Fabian Cancellara (Trek) devant les Belges Tom Boonen (Omega Pharma-Quick Step) ou Sep Vanmarcke (Belkin). Loin devant les Français.
 

Le poids du sacro-saint Tour de France
 

Sur Paris-Roubaix, les Français ont, ces dix dernières années, collectionné de manière désordonnée les places d’honneur (Sébastien Turgot 2e en 2012, Damien Gaudin 5e en 2013, Florent Brard 7e en 2005, Frédéric Guesdon 7e en 2006, Sylvain Chavanel 8e en 2009 ou Sébastien Hinault 9e en 2010), quand les coureurs étrangers défilent sans surprise avec ponctualité. Les Français courent après le rêve d’un pavé levé vers le ciel depuis Frédéric Guesdon en 1997. Ils s’illustrent sur les courses par étapes (un bouquet sur le Tour de France en 2013 avec Christophe Riblon lors de l’étape reine de l’Alpe-d’Huez, cinq en 2012 ou six en 2013) mais ne connaissent pas la même réussite lors des classiques réservées aux spécialistes habitués à frotter, pour se placer, éviter les pièges. Réciter le parcours dans ses moindres détails.

Cofidis, racines régionales obligent, a dès son apparition dans le peloton professionnel, en 1997, cultivé le goût pour les classiques du Nord. Marc Madiot, manager de la formation FDJ.fr, suite logique de sa carrière de coureur (lauréat de Paris-Roubaix en 1985 et 1991), vit et vibre depuis toujours pour cette course. Le sacro-saint Tour de France et le culte des courses par étapes ont, en France, longtemps dicté, jusqu’à l’obsession, le rythme des coureurs. Us et coutumes qui ont progressivement volé en éclats. Europcar, autour de son directeur sportif, Dominique Arnould (dernier champion du monde français de cyclo-cross en 1993), a ainsi étoffé et aguerri son groupe d’éléments capables de s’y distinguer (Vincent Jérôme, 11e et premier Français du dernier Tour des Flandres).

 

Une chasse gardée
 

Les classiques s’inscrivent dans le calendrier comme des épreuves atypiques (kilométrage, difficulté) que les prétendants aux prestigieuses courses par étapes ont progressivement appris à bouder, freinés par la peur des chutes et des blessures, abandonnant le terrain à des coureurs durs au mal, souvent trentenaires, imperméables aux conditions climatiques souvent hostiles. Des protagonistes soucieux de défendre leur territoire car leur fenêtre d’exposition est limitée. « On s’entraîne dès le mois de novembre pour une date sur le calendrier. Pas pour la veille ou le lendemain, on doit être prêt le jour J. Contrairement à une course par étapes, on n’a pas la possibilité de se rattraper le lendemain. Si on se loupe, il faut attendre l’année suivante », a, dans L’Équipe, résumé Andreï Tchmil, vainqueur de l’« Enfer du Nord » en 1994.
 

Le futur Bleu s’ébauche
 

Endurance, connaissance et patience, la panoplie du coureur de classiques ne s’assemble pas en un jour. La nouvelle génération de coureurs français, décomplexée, polyvalente, est, sur Paris-Roubaix incarnée par Arnaud Démare (FDJ.fr, 22 ans, récent 2e de Gand-Wevelgem, course réputée du calendrier). Marc Madiot se méfie des dangers de l’exposition, le préserve, assure qu’il est encore en apprentissage. Classé 91e l’an dernier pour sa première participation, le Picard assure : « J’aime profondément cette course. Les pavés me conviennent et ne me font pas peur. Les grandes classiques me font rêver. Je ne suis pas qu’un sprinter. Je suis également porté vers l’attaque et je suis assez endurant. » L’avenir appartient à Arnaud Démare et ses « frères » de classe d’âge. la France veut combler le vide. Le talent et la fougue peuvent accélérer les événements…
 

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