Les Anciens, tel Lucain dans La Pharsale, disaient de la guerre civile qu'elle est la pire de toutes. Dans Pas pleurer, Lydie Salvayre laisse la parole à une fille qui, à travers l'histoire de sa mère, retrace les souvenirs d'une famille déchirée par la guerre espagnole : « Ma mère, le 18 juillet 1936, ouvre sa gueule pour la première fois de sa vie. » Celle-ci, Montse, habite un village catalan. Elle est issue d'un milieu paysan et pauvre. Le frère de Montse, Josep, jeune paysan fougueux, se découvre une nature anarchiste à la lecture de Tierra y Libertad. Lydie Salvayre décrit la fureur franquiste - comme celle de la Phalange à Palma de Majorque - qui a fait de l'Église espagnole « la Putain des militaires épurateurs », ainsi que l'écrivait Bernanos, maintes fois sollicité. Avec une grande justesse, l'auteur aborde les rapports entre membres de la même famille : Josep s'oppose au père, borné et conservateur, tandis que Montse aspire à une émancipation que sa mère soumise ne peut atteindre. À l'inverse de James Salter, qui conte tour à tour la guerre, la famille, l'amour, Lydie Salvayre lie le tout dans un même mouvement romanesque.