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Des milliers d’élèves qui ont ont fait leur rentrée avec deux mois de retard, des examens du premier trimestre reportés, la décision de retenue des notes du premier et du deuxième trimestre et la menace de boycott des examens à venir… L’école publique est en crise en Tunisie.
Le secrétaire général de la Fédération de l’Enseignement secondaire relevant de l’UGTT, Lassaad Yakoubi multiplie les sorties médiatiques en promettant à chaque fois un peu plus d’escalade dans les revendications, faisant planer sur les élèves et leurs familles, la menace d’une année blanche…
Des enfants pris en otage et des parents inquiets
Tous les jours, Ridha Zahrouni, Président de l’Association tunisienne des parents et des élèves (ATUPE) reçoit des appels de parents inquiets pour l’avenir de leurs enfants. Inquiets qu’ils ne soient confrontés à une année blanche, inquiets pour leurs enfants qui, depuis plusieurs années n’arrivent pas à suivre une année scolaire stable, sans perturbations…
« En plus de la situation catastrophique que connait déjà le système éducatif tunisien, l’année scolaire en cours a connu un démarrage très difficile avec la grève des enseignants vacataires, puis le report des examens qui devaient se dérouler au mois de décembre et reportés en janvier et aujourd’hui la retenue des notes pour le premier trimestre et la décision de les retenir également pour le deuxième trimestre. Ajouter à cela, la menace de boycotter les examens du deuxième et du troisième trimestre », nous dit M. Zahrouni.
Ce dernier, multiplie lui aussi les alertes dans les médias en affirmant que les enfants courent aujourd’hui un danger, considérant les différentes formes de protestation de la fédération de l’enseignement secondaire, comme étant une « violence morale » envers les élèves.
« Les parents sont frustrés, inquiets,marginalisés et touchés dans leur dignité et dans leur droit. Certains sont véritablement au bord de la crise de nerfs en raison du déroulement de l’année scolaire de leurs enfants. Ils se retrouvent impuissants et devant le fait accompli».
Ce sont les enfants qui paieront la facture
Rida Zahrouni, indique par ailleurs que le manque de stabilité dans le déroulement de l’année scolaire peut avoir des conséquence désastreuse sur le parcours scolaire des élèves.
« Malheureusement cette situation va accentuer le décrochage scolaire, déjà important dans notre pays, mais aussi les inégalités entre les élèves qui ont accès aux cours particuliers et ceux dont les moyens financiers ne le permettent pas », nous dit-il.
« Avec l’état de l’école publique qui n’est plus gratuite, qui n’est plus une institution de justice sociale et qui ne constitue plus un ascenseur sociale, on imagine la crainte des parents pour l’avenir des enfants », a-t-il ajouté.
La détérioration du système éducatif en Tunisie a provoqué d’importants changements structurels. La réponse première est bien sûr la fuite inexorable des enfants de l’école publique vers l’école privée, aggravant de ce fait, les inégalités sociales. « Je connais même des parents, qui en ont les moyens financiers, qui ont envoyé leurs enfants à l’école à l’étranger », rappelle Zahrouni.
Quelque soit la conclusion de ces litiges, ce seront toujours les enfants qui paieront la facture. Il y a toujours des moyens alternatifs pour exprimer les revendications. L’éducation et la stabilité dans le parcours scolaire sont des droits fondamentaux qui sont aujourd’hui bafoués », déplore Zahrouni.
C’est à l’Etat de trouver une solution et non pas au ministre
« Dans la gestion des différentes crises successives qu’a connu le système éducatif, nous avons toujours été contre l’implication des enfants dans les conflits », souligne le président de l’ATUPE.
Selon lui, une simple lecture permet de constater qu’il s’agit encore une fois de revendications à caractère financier. Or dans ce cas précis, le fautif principal est d’après Zahrouni, l’Etat. « Soit ces revendications sont légitimes mais impossibles à satisfaire, auquel cas, il faudrait trouver un moyen de négocier dans cette logique. Ou alors elles ne sont pas légitimes et l’Etat se doit d’agir fermement pour ne pas laisser les élèves sans cours », affirme-t-il.
« Il faut que l’Etat arrête de jouer au pompier avec des mesures qui vont régler le problème temporairement. Le système éducatif subit des difficultés structurelles et chroniques qui nécessite une refonte totale du secteur éducatif », a-t-il poursuivi.
Du côté des autorités, on campe sur ses positions. Les séances de négociations n’ont abouti à aucun compromis. La seule annonce a été le remplacement du ministre de l’Education, ce lundi 29 janvier après un petit remaniement ministériel. Ainsi, Fethi Sellaouti a été remplacé par Mohamed Ali Boughdiri, dont la nomination a fait beaucoup parler. En effet ce dernier n’est autre que l’ex-secrétaire général adjoint de l’UGTT et adversaire de l’actuel chef de file de la centrale syndicale Noureddine Taboubi.
Pour Ridha Zahrouni, cette nomination n’est rien d’autre qu’un écran de fumée. « C’est comme si on voulait créer un choc psychologique en ramenant une nouvelle tête. Les difficultés auxquelles font face le secteur de l’éducation ne dépend pas de la personnalité du ministre mais de la gestion des dossiers qui relèvent en réalité du gouvernement et de la présidence de la république ».
Une réalité confirmée par la déclaration de Lasaad Yacoubi lors de la prise de fonction de Boughdiri dans laquelle il avait affirmé que « « les noms changent mais les revendications restent ».
« Le dossier de la réforme éducative ne doit pas être uniquement l’affaire du ministère de tutelle et du syndicat. Il doit être attribué au conseil supérieur de l’éducation qui n’a pas encore vu le jour malgré sa constitutionnalité depuis juillet dernier », conclut Zahrouni.
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