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En termes de réservations sur la Tunisie, le marché français semble encore hésitant, avec une tendance à la baisse estimée à -1,1% par rapport à l’année 2013.
Cette hésitation contraste avec le regain de confiance et la tendance positive affichée par la plupart des autres marchés européens, et que démontrent les derniers chiffres publiés par le ministère du Tourisme.
Pis encore, les tours opérateurs français comme TUI France, Fram et Club Med, affichent des baisses respectives de 17, 25 et 15,6%. Par rapport à 2010, la France, premier marché du tourisme tunisien en Europe, affiche une baisse de 44,8%, en terme d'entrées. Ce qui est pour le moins inquiétant, étant donné l’évolution positive de la situation sécuritaire dans notre pays, dont l’image à l’étranger est en nette amélioration.
Le tourisme, principal pourvoyeur de devises et secteur qui emploie, d'une façon directe ou indirecte, environ 2 millions de Tunisiens, peine à surmonter sa crise et à remonter la pente.
Entre appréhensions et attentisme
Affecté par les troubles qui ont secoué le pays depuis la chute du régime de Ben Ali en janvier 2011, le tourisme tunisien, faute d’imagination et d'innovation, a été réduit à un mode d'hébergement «forfait tout compris» ou «all inclusive» sans valeur ajoutée et à une tendance à brader les prix, qui a réduit ses recettes.
Les Français, qui ne sont qu'à deux heures de vol de Tunis, semblent encore réticents à réserver pour leurs vacances d'été en Tunisie, en attendant l’amélioration de la situation politique, sociale et sécuritaire dans notre pays.
L'intention exprimée du ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, de passer ses vacances en Tunisie cet été en famille, pourrait inciter les Français à revenir dans le pays. Mais les Tunisiens demandent encore au locataire du Quai d'Orsay de diffuser une carte plus attirante des territoires tunisiens, car les tours opérateurs prennent au sérieux ses instructions.
Dans sa rubrique «conseils aux voyageurs» sur le site de la diplomatie française, les messages ne sont pas, en effet, aussi rassurants. Tout en signalant «un contexte général d'évolution positive de la transition démocratique et de stabilisation de la situation politique et sécuritaire en Tunisie», la France recommande à ses ressortissants de «consulter régulièrement le site de l'ambassade et du consulat général de France en Tunisie, notamment, en raison de sécurité toujours en cours dans les zones frontalières», ajoutant que «celles-ci sont à éviter». Elle leur recommande aussi d'«observer la plus grande prudence lors des déplacements dans les gouvernorats frontaliers de Kasserine, Kef et Jendouba» et de «rester sur les grands axes routiers» et d'«éviter les déplacements de nuit dans ces zones».
C'est dans l'optique d’améliorer cette image d’une Tunisie instable que s'est inscrite la visite effectuée, les 28 et 29 avril 2014, par le chef du gouvernement provisoire, Mehdi Jomaa, à Paris, en compagnie d'une importante délégation ministérielle et de nombreux hommes d'affaires tunisiens.
Les messages rassurants se sont succédé, avant, au cours et après, cette visite. Les Tunisiens à l'intérieur et à l'extérieur du pays ont envoyé un seul message: «La Tunisie est plus que jamais sûre, ne craignez pas de vous y rendre».
Certains n'ont pas attendu les démarches du département du tourisme et ont pris l’initiative de lancer leurs propres campagnes pour encourager les touristes français à venir en Tunisie. C'est le cas du directeur de la publication ‘‘Tunisie Plus’’, Hosni Djemmali qui continue de faire signer un appel «Cet été, je vais en Tunisie», auquel continuent d'adhérer de nombreux français (plus de 150 signatures dans le numéro 22 de la publication).
Un désamour passager
Amel Karboul, ministre du Tourisme, qui a accompagné le chef du gouvernement dans sa visite parisienne, a affiché un optimisme mesuré. Elle a déclaré à l'agence Tap qu'elle s'attend à une amélioration après la visite effectuée en France et le lancement de son plan 3+1.
«Nous sommes en train de travailler sur la réputation de la Tunisie et nous avons rencontré la secrétaire d'Etat français au Commerce extérieur, au Développement du tourisme et aux Français à l'étranger, Fleur Pellerin, et le directeur général d'Atout France (agence de développement touristique). Ils vont nous aider à montrer aux Français l'image d'une Tunisie qui dégage beaucoup d'énergie positive et représente une valeur sûre», a-t-elle expliqué.
La ministre voit en la révolution des avantages ne peuvant qu'être appréciés par la France, pays connu pour ses valeurs et son respect des droits de l'homme.
«C'est vrai que durant les dernières années, nous avons eu une révolution. Mais la Tunisie a eu, de temps à autre, depuis 3.000 ans, une révolution, cela fait du bien, et je pense que la liberté de s'exprimer, la liberté de débattre et la liberté de vivre, sont des valeurs très importantes pour la France. Ceci va inciter les Français à venir nombreux dans notre pays», a-t-elle affirmé.
Dans des déclarations à la presse, la ministre avait expliqué le faible pourcentage des touristes français (13%) en Tunisie par le fait que les médias français parlent beaucoup plus de la situation du pays que leurs confrères en Europe. Elle avait indiqué que ce «désamour» ne peut durer parce qu'«entre le peuple français et le peuple tunisien, il existe une relation passionnelle qui ne peut s'interrompre durablement».
La femme à la volonté d'acier, convaincue de la force de l'action plus que des discours, avait aussi, lancé que «tous les citoyens doivent contribuer à la relance du tourisme. Chaque Tunisien doit se conduire en responsable de son pays».
Les Français n'ont jamais boudé
Interrogée sur les raisons de cette attitude de prudence et d'hésitation de la part des Français à se rendre en Tuniie, Leila Tekaya, représentante de l'Office national du tourisme tunisien (ONTT) à Paris, a répondu que «les Français n'ont jamais boudé la Tunisie, ils ont toujours aimé ce pays».
«C'est juste qu'ils sont dans une phase d'incertitude, c'est légitime et humain. Avant de prendre une décision, ils ont voulu observer et attendre que nous fassions notre ménage», a- t-elle expliqué. Et d'ajouter: «C'est une tendance générale et internationale, car aujourd'hui, à cause de la crise économique, les portefeuilles déterminent, aussi, les destinations des touristes».
Selon la responsable, il y a un nouvel élan de retour des touristes et un retour de la confiance, car «tous les signes positifs (adoption de la constitution, gouvernement de compétences…) qui ont été transmis à l'échelle internationale, ont favorisé une communication positive et suscité de nouveau la confiance au sein de la société française».
Mme Tekaya a estimé que le cap le plus difficile, à savoir la perception d'un pays qui n'offre pas la sécurité, a été franchi. «Nous sommes en train de construire sur la confiance moyennant différents leviers (images, publicité, communications, relations publiques..) et nous sommes optimistes pour cette saison», a-t-elle encore déclaré.
La crise n'a rien de conjoncturel
D'après certains professionnels du tourisme tunisiens et français, «la crise par laquelle passe le secteur touristique n'a rien de conjoncturel et relève plutôt d'une défaillance structurelle, dont les effets s'inscrivent sur le long terme».
Il y a lieu de signaler que le tourisme participe à la compensation du déficit commercial en Tunisie à hauteur de 62,5%, grâce aux recettes en devises qui représentent à peu près 15% des recettes globales du pays. Or, la Tunisie, jadis pionnière en matière de tourisme dans la région, fait aujourd'hui figure d'une destination «pas chère» avec tout ce que cela comporte comme connotation négative et préjugés.
L'activité touristique est dominée par le balnéaire, qui a sanctionné, en quelque sorte, toute autre activité périphérique et contribué à la marginalisation d'autres facettes de la Tunisie «historique, culturelle, culinaire...».
A cet effet, les professionnels considèrent que le tourisme tunisien doit s'attaquer à tout ce qui empêche le pays de devenir une destination attrayante et l'aider à sortir du statu quo dans un monde en pleine mutation. Il s'agit de s’attaquer, en premier, aux problèmes d'environnement, qui sont un grand frein à l'activité touristique, et qui se sont aggravés depuis la révolution.
Pays ensoleillé, riche de paysages naturels et au climat tempéré, la Tunisie est à même d’accueillir des touristes du monde entier, à condition de hisser le secteur touristique à un niveau supérieur et de suivre le rythme des mutations à l'échelle internationale, alors que se développe le «tourisme digital».
I. B. (avec Tap).
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