Cannes 2015: le pseudo scandale sexuel «Love» a fait pschitt

Annoncé sur la Croisette comme le film qui devait déclencher les foudres de la critique, le sulfureux film de Gaspar Noé a semble-t-il éteint les ardeurs d'une critique unanime, ironique et moqueuse.

N'est pas Lars Von Trier qui veut. Avec ses scènes de sexe crues, «Love», tourné en 3D, laisse peu de place à l'imagination: éjaculations en gros plan, orgie dans un sex-club, travesti...

Un précédent film de ce réalisateur, né en Argentine, «Irréversible» avait scandalisé la Croisette en 2002.

Les affiches avaient donné il y a quelques semaines un avant-goût du film, l'une d'elles présentant un pénis en gros plan.

Gaspar Noé, 51 ans, a expliqué avoir voulu tourner en 3D car cette technique donne au spectateur «un plus grand sens d'identification avec le personnage principal et son état mélancolique». Depuis plusieurs années, des pornos classiques sont tournés en 3D.

Plus de 2.000 personnes ont formé une file d'attente bien avant l'heure de la projection, peu après minuit jeudi, mais des dizaines disposant de billets n'ont pu entrer dans le Palais des Festivals et ont vivement protesté.

Le film raconte les souvenirs que Murphy, un réalisateur, a gardés de sa plus grande histoire d'amour, de passion, de jeux et d'excès.

Qualifiant son film de «mélodrame contemporain», le cinéaste, qui vit et travaille en France, a expliqué avoir voulu «montrer l'état amoureux du côté sexuel», lors de la conférence de presse qui a suivi la projection.

«Tout le monde ne pense qu'à baiser... Pourquoi les moments les plus glorieux de la vie de chacun ne pourraient pas être représentés? Je n'ai pas l'impression qu'il y ait la moindre transgression dans le film. Il n'y a rien que l'on n'ait pas vu ailleurs, rien de choquant!», a-t-il lancé.

«Aujourd'hui, le sexe explicite est partout. On ne peut pas lutter contre ce que le monde est devenu, mais on peut chercher à assainir cette sexualité devenue une schizophrénie de la relation amoureuse», a ajouté Gaspar Noé à propos du sexe sur internet.

Il a exprimé l'espoir que son film échappe en France à l'interdiction aux moins de 18 ans. Sa sortie est programmée le 15 juillet.

Thierry Frémaux, le sélectionneur du Festival de Cannes, a défendu la démarche du cinéaste: «Gaspar Noé a fait un film qu'on aime ou qu'on n'aime pas. La littérature ou la peinture visitent la question de la représentation des corps, du sexe, de l'amour physique. Très peu de cinéastes l'ont fait en 120 ans de l'histoire du cinéma: Bertolucci, Oshima, Bellocchio, Lars van Trier et Gaspar Noé.

 

Même producteur que ‘Welcome to New York

Le film est produit par Vincent Maraval, également producteur de «Welcome to New York» sur l'affaire DSK, sorti uniquement en VOD.

Le cinéaste n'en est pas à sa première controverse. La projection, en 2002 sur la Croisette, de son film avec Monica Bellucci et Vincent Cassel, «Irréversible», qui montre notamment une interminable scène de viol, avait scandalisé le festival.

Une vingtaine de personnes avaient été victimes d'évanouissements ou de crises de nerfs à la projection et des dizaines de spectateurs avaient préféré quitté la salle.

Gaspar Noé a eu droit cette fois à une longue ovation debout après la projection. Mais le film a aussi été étrillé sur les réseaux sociaux où l'on parlait de «mauvais sexe dont on ne voit pas la fin».

Les critiques de la presse sont très négatives. «Ce n'est pas un film porno - le dialogue n'arrive pas à ce niveau», a ironisé le journaliste de la BBC, Jason Solomons.

Pour François Aubel, rédacteur en chef du service culture du Figaro, «Love» est un «film du samedi soir sur Canal+ avec un argument amoureux pénible». Le Guardian britannique a trouvé le film «absurde, mal joué et bavard».

«Noé veut montrer du cul, mais ce n'est pas excitant. Il ne peut s'empêcher de troubler la beauté de sa mise en scène en ponctuant +Love+ de son narcissisme et de son envie de déranger le monde», a commenté Clément Ghys de Libération.

«La dernière chose à faire à Cannes, c'est de lire les critiques!», a estimé pour sa part Thierry Frémaux.

 

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