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Des corps qui se mêlent, se secouent, orchestrent un sabbat. Au théâtre au bord de l'eau, à Lausanne, «Seven Pleasures», à voir encore ce soir, réfléchit au sexe et à la nudité avec un spectacle libéré
Douze danseurs qui se dénudent dans le public, montent sur le plateau et forment un tas, au fond, entre le canapé et le rideau. Mette Ingvarsten, chorégraphe danoise qui réfléchit sur la part subversive et jouissive de la nudité, ne fait pas les choses à moitié. Que ce soit dans «69 positions», il y a deux semaines à Vidy, ou dans «Seven Pleasures» à voir encore ce soir au théâtre au bord de l’eau, la trentenaire explore le sujet avec une forme de légèreté inspirée. Corps qui rampent, se hissent, se disloquent. Corps qui tremblent, se secouent – seins et pénis cadencés –, se frottent. Dans «Seven Pleasures», la Danoise dit envisager le plaisir au-delà de la sexualité. Vu la construction en climax de sa pièce, l’exploration hors les joies de la chair n’est pas évidente, mais la traversée reste revigorante.
Sept étapes qui incluent le tour de chauffe, la montée en puissance, l’acmé, puis l’apaisement post-jouissance avant de retrouver une sorte de vivacité innervée. Après le monde en charpie évoqué dans «Empire» de Milo Rau, la semaine dernière, Vidy offre avec «Seven Pleasures» un répit réjoui. La guerre et le sexe, on ne pourra pas reprocher au théâtre au bord de l’eau de passer à côté des sujets qui font tourner et tousser le monde! Mais pas de mauvais esprit. Mette Ingvarsten analyse la nudité et le plaisir, elle ne les offre pas comme des objets premiers.
Le public mime un orgasme
Dans «69 positions», la danseuse enfile même des habits de conférencière qu’elle enlève plus tard pour danser nue parmi le public et présente, sur un plateau transformé en galerie avec panneaux et écran TV, le rôle qu’a joué la nudité dans l’art contestataire de ces soixante dernières années. Le ton est doux, sensible et, il y a quinze jours, le public de Vidy a très bien accueilli ce retour sur des décennies de subversion artistique, témoigne Vincent Baudriller, maître des lieux. Dans «69 positions», le spectateur est convié à danser, bras levés, frapper dans les mains, masser les fesses de la danseuse et, même, «mimer un orgasme», précise le directeur en souriant. Un apprentissage en action, donc, qui a ravi Vidy et sera présenté en mai prochain à Genève, à l’adc.
L’art du tas
Dans «Seven Pleasures», en revanche, le public n’est pas sollicité. Les douze danseurs arpentent entre eux les voies de la transe, réglant leur progression sur un schéma classique qui va du plus calme au plus secoué pour revenir à la quiétude repue, avant de s’adonner à une forme de créativité libérée. Tout commence donc par un tas. Corps enchevêtrés qui, doucement, se mettent à ramper, coulisser, se déplacer. Sur la scène, le canapé, la table et le fauteuil sont bientôt engloutis par cette masse articulée qui négocie sans heurts reliefs et aspérités. Le moment est beau, dans ce lié-délié savamment organisé. Puis les corps s’éloignent les uns des autres et ces silhouettes éparpillées au sol figurent un champ de bataille. Mais très vite vient le temps de la douceur, caresses sur une plante, une table, un projecteur. Le corps se chauffe, s’échauffe, le sabbat peut commencer.
Tempête et transe sur le plateau
Cheveux longs, moustache accorte, un danseur donne le ton de la transe. Il se secoue sur fond de percussion tribale et, très vite, ce sont douze corps qui s’ébranlent, comme traversés par un courant électrique. Ils sourient, se touchent, bondissent et rebondissent, tournent sur eux-mêmes, encerclent le canapé, montrent leur dos, mettent la tête en bas, jouent avec une corde, se déchaînent sur des meubles, des objets, s’en prennent au rideau. La lumière elle aussi entre dans la frénésie et chaque projecteur joue sa partition solo. Tempête, transe, l’apothéose gagne le plateau.
Cette séquence haletante est la plus saisissante. Toujours fascinant de voir des corps dionysiaques, affolés, possédés, lancés à cent à l’heure, au sommet de leur fièvre et de leurs capacités. Les étapes consacrées ensuite à l’apaisement dans la pénombre et à l’invention d’une autre créativité, plus ludique et plus posée, peinent à concurrencer, question intensité. Mais le ballet des jambes et des pieds sur le canapé, la rangée de fesses exhibées ou le concert final de bruits de bouche et de gorge offrent encore de beaux instants T.
Sentiment de déjà-vu
Plus généralement, l’ennui avec la nudité, ce sont les référents, nombreux en danse contemporaine. Xavier Leroy et son corps matière, Jérôme Bel et son corps publicitaire ou encore La Ribot et sa satire du corps-objet, la nudité est un topique de la discipline et il est difficile de ne pas éprouver un sentiment de déjà-vu face à ce dernier dévoilement. De fait, dans son diptyque, Mette Ingvarsten se réfère sans ambiguïté à l’avènement de la nudité dans l’art, ce courant libertaire des années soixante qui a souhaité et est parvenu à désexualiser le corps. Elle assume donc ces référents. N’empêche, l’impression de bégaiement empêche de tout à fait s’embraser pour «Seven Pleasures», le second volet de son projet.
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