Mois de jeûne musulman, le ramadan entraîne un changement dans les habitudes alimentaires, les principaux repas étant pris après le coucher du soleil et avant l'aube. Les tables sont festives et copieuses, et les mets servis sont souvent riches en sucre et en matières grasses... de quoi favoriser un gain de poids. Or il est possible de rompre son jeûne tout en adoptant des « habitudes saines ». Carla Habib Mourad, spécialiste en nutrition clinique, démystifie les idées reçues au sujet du régime alimentaire durant ce mois sacré de l'année. Au nombre de ces idées reçues :
 

Le « souhour », un repas que l'on peut sauter...
 

De nombreux fidèles préfèrent sauter le « souhour », c'est-à-dire le repas pris avant l'aube, pour ne pas avoir à se réveiller ou encore pour éviter de prendre du poids. Or ce repas est important et il ne faut surtout pas le rater. Il est indispensable de prendre « deux repas équilibrés » et un snack. De plus, le repas du « souhour » est essentiel pour pouvoir subsister, mais surtout pour hydrater le corps, d'autant que le mois du jeûne tombe cette année durant la saison chaude et que les journées sont longues, pouvant atteindre près de 16 heures de jeûne.
 

L'idéal serait ainsi de prendre l'équivalent d'un petit déjeuner. Un « souhour » peut être composé à titre d'exemple d'une galette au thym (man'ouché) ou d'une assiette de fèves, ou encore d'une assiette de blé bouilli, ou tout simplement de pain avec des produits laitiers (labné, fromage...). L'un de ces mets sera accompagné d'une tasse de « sahlab », de fruits, d'eau, d'un café ou d'un thé.
 

Il est conseillé de prendre son café quelques minutes avant la prière de l'aube (Imsak). Cela est susceptible d'empêcher la survenue d'une migraine due au manque de caféine.
 

Les douceurs sont essentielles pour compenser le manque de sucre
 

Il n'est pas du tout vrai que les douceurs servies en grande quantité durant le mois de ramadan sont indispensables pour revitaliser le corps et compenser le manque de sucre subi au cours de la journée. En effet, tous les aliments à base de glucides, comme le riz, les pâtes, les pommes de terre, le pain et les dattes, se transforment en sucre dans le sang. Le besoin de douceurs n'est qu'une simple gourmandise due à une fringale. Il est donc possible de se satisfaire en se servant une portion de gâteau simple comme une pièce de sfouf, un kellage cru, des katayefs crus, ou encore une petite tasse de mhallabiyé, de meghlé, de riz au lait...
 

Les jus aident à rétablir les minéraux dans le corps
 

C'est l'une des principales idées reçues. Après de longues heures de jeûne, le sucre et les minéraux dans le corps sont rétablis par le simple fait de prendre deux ou trois dattes, un bol de soupe et un verre de yaourt.
 

Par ailleurs, il ne faut pas oublier que les jus sont riches en sucres rapides. Un verre de jellab, de jus d'orange, de tamarin contient l'équivalent de cinq à six cuillerées à café de sucre.
 Il est difficile de s'hydrater après une journée de jeûne...
 

Les personnes qui jeûnent ont un plus grand risque de développer des calculs. L'eau est donc indispensable pour les évacuer, sans oublier que cette boisson naturelle est indispensable pour hydrater la peau et pour un bon fonctionnement des reins. Entre l'« iftar » et le « souhour », il est conseillé donc de boire au moins un litre et demi à deux litres d'eau. Pour mieux s'hydrater, il est également recommandé de consommer des légumes et des fruits riches en eau, et de privilégier les soupes de légumes et de lentilles.
 

Maintenir son poids
 

Pour maintenir son poids, il est conseillé de limiter la variété des plats. Même si on se sert de petites quantités, le simple fait de goûter à plusieurs plats au cours d'un même repas entraîne la consommation d'une grande quantité d'aliments. Il serait sage de prévoir un seul plat de résistance par repas.
 

Un repas idéal débutera ainsi par une portion de deux dattes accompagnée d'un verre d'eau, suivie d'un bol de soupe et d'une salade. Une demi-heure plus tard, le plat de résistance est servi. Celui-ci doit être composé de glucides (riz, légumineuses, pâtes, pommes de terre, etc.) et de protéines (viande, poulet ou poisson).
 

Quid des diabétiques ?
 

L'islam exempte les personnes souffrant de maladies chroniques de jeûner. Toutefois, 54 % des musulmans souffrant d'un diabète de type 1 et près de 86 % de ceux souffrant de diabète de type 2 observent le jeûne du ramadan, selon des études internationales. Cela inquiète les médecins qui craignent les complications qui pourraient survenir suite à ces longues heures de jeûne.
 

Si la personne diabétique insiste à observer le jeûne du ramadan, il est impératif qu'elle consulte son médecin pour réguler les doses de médicaments. Dans certains cas, le jeûne sera interdit, notamment si le patient est sous insuline ou si sa maladie présente des complications évolutives comme un infarctus du myocarde, une rétinopathie diabétique (atteinte de la rétine), une néphropathie ou une insuffisance rénale, ou encore s'il présente un pied diabétique.
 

Sur le plan diététique, une personne diabétique doit impérativement prendre le repas du « souhour » le plus tard possible. Elle doit aussi éviter les matières grasses qui augmentent le taux de graisse dans le sang (LDL ou mauvais cholestérol et triglycérides), d'autant qu'une personne diabétique a plus de risque de développer des maladies cardio-vasculaires. Elle doit aussi éviter les aliments qui contribuent à élever le taux de sucre dans le sang, comme les douceurs, et en limiter la consommation à une portion par semaine.
 

Les douceurs les plus acceptées sont les katayef grillées farcies de préférence aux noix et servies sans sirop de sucre, les sfoufs, les desserts à base de lait (riz au lait, mhallabiyé...), le meghli, halawet el-jebn ou el-rezz sans kachta.
 

Une personne diabétique peut consommer deux portions de fruits par jour. En cette saison, les fruits les plus recommandés sont la pomme, la poire, la pêche et la pastèque.