Polyarthrite rhumatoïde: traiter vite est essentiel

Touwensa. Agences-  Maladie inflammatoire chronique, la polyarthrite rhumatoïde frappe avec une sévérité variable 300.000 personnes en France, dont 80 % de femmes.

C'est le plus fréquent des rhumatismes inflammatoires, mais ses effets vont bien au-delà des articulations. L'arrivée de nouveaux médicaments a en quelques années transformées le quotidien des malades, qui doivent souvent se traiter à vie. Mais pour les spécialistes, il faut encore réduire le délai d'instauration du traitement, car plus il est précoce, plus les chances de rémission complète et durable sont élevées. Dans ce cas, il devrait même devenir possible d'alléger le traitement voire, selon des études récentes, de parfois l'interrompre.
 

«L'apparition brutale de douleurs articulaires des mains ou des pieds, de raideurs des articulations au réveil, de gonflements, est très évocatrice d'une polyarthrite rhumatoïde et doit donc conduire à consulter vite», insiste le Pr Pierre Miossec (service d'immuno-rhumatologie, CHU de Lyon).
 

Le diagnostic se fait sur l'examen clinique du patient, complété par des examens biologiques et radiologiques. Très douloureuse, souvent handicapante, la polyarthrite rhumatoïde s'attaque aux articulations, en particulier des mains et des pieds, qu'elle détruit et déforme. C'est une maladie inflammatoire à composante auto-immune, très hétérogène, dont l'évolution par poussées reste imprévisible, tout comme la réponse aux traitements. «La maladie risque d'être plus sévère si, dès le début, l'inflammation est élevée, avec des signes d'auto-immunité et des destructions articulaires», précise le Pr Marie-Christophe Boissier, rhumatologue (CHU Bobigny).
 

Le tabac, facteur aggravant
 

La polyarthrite rhumatoïde est aussi sous l'influence de facteurs génétiques, hormonaux et environnementaux, dont le tabac, son principal facteur aggravant. «L'évolution des malades qui fument est constamment plus sévère», insiste le médecin.
 

«L'inflammation chronique va devenir peu à peu indépendante de la réaction immunitaire initiale et finir par s'autoentretenir elle-même. C'est comme si on passait d'une maladie à une autre… Ceci expliquerait que les traitements ciblant des composants immunitaires, efficaces en début de maladie, perdent parfois ensuite en efficacité», estime le Pr Miossec. D'abord locale, l'inflammation diffuse, devient systémique. Elle retentit notamment sur la paroi interne des vaisseaux, d'où le risque cardio-vasculaire de ces malades, très supérieur à la normale.

Cette atteinte systémique fait la gravité de la maladie.
 

Comme les destructions articulaires ne surviennent qu'après quelques mois d'évolution, il faut absolument traiter durant la «fenêtre d'opportunité» qui précède, rappellent de récentes recommandations*. «Les patients devraient être pris en charge par un spécialiste de la maladie dans les 6 semaines suivant les premiers symptômes. Quand le traitement commence dans ce délai, le taux de rémission est supérieur à 50 %. Mais nous les voyons souvent bien plus tard», regrette le Pr Bernard Combe (service d'immuno-rhumatologie, CHU Montpellier).
 

Progrès dans la prise en charge
 

Selon ces recommandations, le traitement doit être décidé avec le malade, qui, bien informé, devient le partenaire du médecin. Puissant anti-inflammatoire, le méthotrexate est le traitement de fond de référence, mais n'est pas toujours donné à dose optimale. L'activité de la maladie doit être contrôlée tous les 3 mois et la stratégie révisée si l'objectif thérapeutique n'est pas atteint. Pour certains malades, le méthotrexate, associé au début à des corticoïdes et à des antidouleurs, suffit. Si les patients ne répondent pas, ou peu, on lui associe une biothérapie. Ces traitements apparus depuis dix ans ciblent spécifiquement un des multiples effecteurs de la réaction inflammatoire. Ils ont radicalement modifié la prise en charge de la maladie. «Mais les progrès sont autant dus à la prise en charge plus rigoureuse des malades qu'aux nouveaux médicaments», insiste le Pr Combe. Aujourd'hui, ils visent surtout deux cytokines inflammatoires, le TNF et l'IL-6, et certaines cellules immunitaires. Mais d'autres sont en développement. Comme le méthotrexate, leur principal effet indésirable est l'augmentation du risque infectieux.
 

Malgré ces progrès, seuls 25-30 % des patients sont en rémission soutenue. Un tiers des autres répondent plus ou moins au traitement et un tiers, mal. Bonne nouvelle, cependant: quelques études montrent que pour 10 à 15 % des patients en rémission complète et durable dans la polyarthrite précoce, le traitement peut être espacé, voire interrompu. «Il faut rester très prudent car on ne peut prévoir l'évolution de la maladie, même si, en cas de rechute, la reprise du traitement semble restaurer la rémission antérieure. On va donc probablement vers un allégement des traitements pour ces bons répondeurs», estime le Pr Combe, coauteur d'une des études.
 

* Publiées par la société française de rhumatologie en avril 2014
 

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