Une majorité de Tunisiens voudrait 'punir' les homosexuels nous dit Elka Consulting !

Un nouveau sondage d'opinion, comme on en voit souvent ces derniers temps vient de tomber pour nous apprendre que 69.6% d'hommes et 59.5% de femmes ont répondu par l'affirmatif à la question : Pensez-vous qu’il faut punir les homosexuels ?

Cette fois, c'est Elka Consulting, une société d'études marketing et d'opinions, qui nous présente les Tunisiens en chiffres. Son Directeur Général Moahmed Ikabl Elloumi, nous dit que lorsque la question a été posée aux sondés, l'art-230 a bien été mentionné.

A la publication des résultats, une vague de protestation est née sur les réseaux sociaux. En effet, plusieurs internautes ont dit que la question était orientée vers une réponse précise. S'agissant d'une question fermée, elle ne laissait pas au sondé beaucoup de choix quant à sa réponse, le poussant à se positionner pour contre la punition de l'homosexuel…

A quoi nous avancent ces chiffres

La première chose à laquelle on pense avant de mettre en place un sondage est l'objectif de ce dernier, pourquoi pose-t-on la question ? Mohamed Ikbal Elloumi, nous dit qu'il est temps de briser les tabous, de voir cette société telle qu'elle était vraiment, d'où ce sondage : les Tunisiens en chiffres.

Sachant que la la société tunisienne est une société conservatrice, que les Tunisiens approuvent rarement ce qui déroge à la morale et aux valeurs de la majorité, les réponses ne sont pas aussi étonnantes que ça, alors pourquoi ne pas poser d'autres questions.

Esuite,  les tabous n'ont-ils pas commencé à être brisés depuis un moment déjà ? D'ailleurs, l'art-230 a lui même fait l'objet d'une grande polémique surtout avec le scandale des tests anaux qui a éclaté avec l'arrestation du jeune Marouane et avec les verdicts émis à l'encontre des 6 jeunes de Kairouan qui ont même été bannis de la ville.

Fortement contesté par la société civile tunisienne, cet article a même été condamné par l'ancien ministre de la justice Mohamed Salah Ben Aïssa qui avait déclaré qu'il fallait l'abroger car il portait atteinte à la vie privée.

Donc il aurait été plus pertinent d'essayer de savoir d'où venait ce refus et pourquoi les Tunisiennes et Tunisiens n'acceptaient pas l’homosexualité.

Cette question nous dit encore le directeur de la société a été posée parmi tant d'autres dans le cadre du "Elka Meter". Friperie, élections, cadeaux du conjoint, environnement, vacances, ciéma, sport et homosexualité sont abordés, voire survolés, dans le même sondage... dessine-ton ainsi les traits d'une société ?

Lors d'un sondage d'opinion il est possible de poser des questions ouvertes où les gens ont la possibilité de développer leurs réponses ou des questions fermées où les réponses sont précises : oui, non, pas d'opinion (comme c'est le cas ici). "Les questions auxquelles l’ont répond par oui ou par non ne permettent pas de capturer les nuances dans l’opinion de la personne interrogée", nous disent certains sites spécialisés dans les sondages.

Quand on veut obtenir les bonnes réponses, en l'occurrence, celle de dessiner les traits de la société tunisienne, les questions ne peuvent donc être aussi concises et limitées. Elles ne peuvent également pas être biaisées en créant un penchant, directement ou indirectement. Prétextat vouloir simplifier la compréhensions de la question sur l'art-230 et son aspect juridique, l'idée de la punition n'a-t-elle pas été suggérée au questionné dans ce cas ?

De plus, d'agissant d'approfondir la compréhension de la société, autour d'un sujet délicat et en pleine bataille contre l'homophobie par bon nombre de composantes de la société civile, les chiffres donnent-ils une idée précise? Ne vaut-il pas mieux faire appel à des indicateurs qualtitatifs que quantitatif ?

Pour finir, rappelons qu'un sondage n'est pas un référendum, il peut poser plusieurs questions sur le même thème évitant ainsi de banaliser les débats importants et permettant de bien interpréter les réponses.

Réactions de la société civile

Interrogés sur leur perception de ce sondage, des activistes de la société civile nous ont livré leurs réactions.

« Pour ma part cette question n'a pas sa place dans un sondage où les autres questions sont est ce que les tunisiens partent en voyage ou si les couples s'offrent des cadeaux
Si on veut vraiment faire un sondage sur ce que pensent les tunisiens de l'homosexualité, les questions doivent être mieux dirigées et plus respectueuses, alors que ce sondage donne une "légitimité" à la condamnation de l'homosexualité d'une manière très légère, ce que je trouve intolérable

On parle de liberté individuelle violée non d'un crime (même si l'État le voit comme ça) la tournure du sondage intensifie le viol de cette liberté » nous dit Bochra Triki.

Ali Bousselmi de l’association Mawjoudin We Exist s’interroge quant à lui sur le sérieux du sondage : « Je pense que c’est juste pour vendre et faire le buzz sur les réseaux sociaux, la question fait appel à l’émotion sans expliquer, elle instaure l’idée de la punition ».

 

Évaluer cet élément
(0 Votes)