Politique de change: Le dérapage infernal du dinar tunisien: peut-on arrêter l’hémorragie?

By leconomistemaghrebin.com septembre 15, 2013 847

La dépréciation de la monnaie tunisienne par rapport aux principales devises étrangères en l’occurrence l’Euro et le Dollar U.S est de plus en plus remarquable, depuis plusieurs mois et a engendré des conséquences négatives sur l’économie, au point que plusieurs analystes ont évoqué l’existence d’une forte possibilité de dévaluer le dinar tunisien, chose que la Banque centrale de Tunisie a formellement refusé à maintes reprises.
 

Bien évidemment, le contexte actuel marqué par l’impasse politique, la dérégulation institutionnelle et l’existence de multiples freins à la croissance, ont largement contribué à l’enregistrement des records de baisse du change de la monnaie nationale, jusqu’à franchir les seuils psychologiques de deux dinars pour l’acquisition d’un euro (2,1950) et de 1,60 dinar pour un dollar (1,6546) échangé. On évoque même un événement historique, majeur et probablement irréversible pour l’économie tunisienne, largement tournée vers l’extérieur. Ceci alimente avec acuité la détresse quant à la stabilité future des fondamentaux macroéconomiques dans leur intégralité.

Plusieurs analystes pensent que le glissement du dinar est justifié par des facteurs exogènes, mais d’autres avancent que les nouvelles données de cotation tiennent à des dimensions endogènes. Toutefois, il faut préciser que la situation revêt aussi des dimensions factuelles structurelles et des origines profondes qui sont à identifier, depuis des décennies, dans les limites du modèle de développement tunisien. Le choc des événements du 14 Janvier 2011 a, par ailleurs, causé la détérioration d’une partie cruciale de l’appareil productif et a accéléré les pressions baissières sur la monnaie tunisienne.

 Aperçu sur la gouvernance du taux de change en Tunisie

La gouvernance du taux de change consiste à identifier le régime de change adéquat, dont on distingue trois catégories: le régime de changes fixes, le régime intermédiaire et le régime de changes flottants et à ce titre, le choix permet de concilier entre les objectifs internes et externes, pour se prémunir contre les chocs et assurer la stabilisation économique.

Le régime adopté accorde, généralement, la priorité à la stabilité des prix, à l’indépendance opérationnelle de la Banque centrale et au respect des normes de transparence et de responsabilité dans la conduite de la politique monétaire. En termes de typologie, on classe les régimes de change, d’une manière générale, comme suit :

    Les régimes d’arrimage ferme basés sur la dollarisation intégrale et l’existence d’une caisse d’émission de  la Banque centrale qui conserve des avoirs extérieurs d’un montant au moins égal à la monnaie locale en circulation et aux réserves bancaires;
    Les régimes d’arrimage souple fondés sur la détermination d’un taux de change stable par rapport à une monnaie d’ancrage à une unité monétaire composite sur une fourchette étroite (± 1 %) ou large. Ceci varie en fonction du temps, généralement selon les différences du taux d’inflation et par rapport à une dévaluation pré-annoncée plus ou moins précise;
    Les régimes de taux de change flottant conçus sur la base d’un taux de change qui est surtout déterminé par le marché, si la Banque centrale intervient, c’est pour limiter les fluctuations à court terme du taux de change.

Selon la classification faite par la plupart des instances financières internationales, la Tunisie est déclarée avoir un régime de flottement administré où la Banque centrale peut intervenir, quand elle le juge nécessaire sur le marché des changes. Le pays est passé du régime de type flottement dirigé à un régime de parités mobiles glissantes relié à un plan de politique monétaire prévoyant des seuils pour les réserves de change et les avoirs intérieurs nets de la Banque centrale.

Le régime de change en Tunisie est classé actuellement comme un régime de  flottement géré dans la mesure où la Banque centrale de Tunisie intervient d’une manière discrétionnaire, à chaque fois qu’elle le juge nécessaire. Il fait partie des régimes intermédiaires.

Les principaux événements qui ont caractérisé l’évolution de la politique de change en Tunisie étaient la dévaluation de 1986, la convertibilité courante du dinar en 1992 et la création du marché de changes interbancaires. Par ailleurs, la politique de change en Tunisie revient à cibler le taux de change effectif réel et veiller à sa stabilité, pour maintenir le niveau de compétitivité-prix de l’économie vis-à-vis des partenaires et des concurrents, afin de réduire les effets des fluctuations des devises qui forment le panier de référence et de donner une relative libéralisation du marché de change. Récemment, une gestion plus flexible de la politique de change a été introduite par la BCT en 2012 et qui consiste à déterminer son taux de change de référence, sur la base du taux de change moyen sur le marché interbancaire et non en fonction d’un panier fixe de monnaies, tout en intervenant sur le marché de change à travers des transactions bilatérales, lorsque les cotations de marché subissent des déviations consistantes par rapport au fixing quotidien; cependant, le flottement géré n’est pas différent de l’ancrage sur un panier dont la construction est gardée confidentielle par les autorités monétaires.

 

 

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Dernière modification le mardi, 26 mai 2015 16:10