Une comète a frôlé Mars dimanche soir

Touwensa. Agences- Siding Spring est passée à toute vitesse, 202.000 km/h, et à moins de 136.000 km de la planète rouge, un événement qui ne se produit qu'une fois par million d'années.

Fraîchement débarquée des confins du Système solaire, la comète C/2013 A1 (Siding Spring pour les intimes) a frôlé Mars dimanche soir, à 20h27 heure française. La boule de glaces et de poussières est passée à 135.895 km de la planète rouge et à la vitesse de 202.000 km/h, a expliqué l'Agence spatiale européenne (ESA) sur Twitter. Cela peut sembler beaucoup, mais aux échelles astronomiques, ce n'est rien de plus que l'épaisseur d'un cheveu. À peine la moitié de la distance qui sépare la Terre de la Lune. Moins d'un millième de la distance Terre-Soleil. De mémoire d'homme, aucune comète n'est jamais passée à moins de dix fois cette distance de la Terre. Un tel événement ne se produit semble-t-il pas plus d'une fois tous les millions d'années pour une petite planète tellurique.
 

Ce rendez-vous inédit a d'abord été source d'inquiétude pour une partie de la communauté spatiale: trois sondes américaines (MRO, Mars Odyssey et la toute nouvelle Maven), une européenne (Mars Express) et la récente indienne (Mangalyaan) sont actuellement en orbite autour de Mars. Si le risque de collision est nul, les comètes se caractérisent par l'émission de nombreuses poussières au fur et à mesure qu'elles se vaporisent en se rapprochant du Soleil. Ces particules forment une chevelure brillante de plusieurs milliers de kilomètres de rayon et une traînée, la queue, qui peut atteindre des millions de kilomètres.
 

Les sondes vont se cacher derrière Mars
 

Comme la comète file à 200.000 km/h, soit plusieurs dizaines de fois la vitesse d'une balle de fusil, chaque grain possède une énergie cinétique considérable. Il y a quelques mois, la Nasa craignait le pire, estimant que chaque mètre carré de sonde traversant la trajectoire de la comète percuterait au moins un grain. Ce chiffre a été très nettement réévalué à la baisse: il n'y a qu'une chance sur un million d'observer une collision de ce type.
 

Les sondes américaines ont tout de même prudemment été programmées pour se cacher derrière Mars au moment du passage à travers la queue de Siding Spring. La sonde européenne Mars Express ne devrait même pas avoir à bouleverser son plan de vol. Toutes vont s'orienter de façon à pouvoir observer le passage de la comète. La caméra HIRISE de MRO devrait permettre d'observer son noyau, dont le rayon ne mesure à priori pas plus de quelques centaines de mètres.
 

Les autres instruments doivent permettre de déterminer la composition gazeuse de la chevelure, de détecter d'éventuelles traces de méthane, d'estimer l'intensité du dégazage et sa variation au cours du temps, etc. «C'est une occasion unique d'observer ce type de comète qui vient directement du nuage d'Oort (un réservoir sphérique de comètes situé à plus de 5000 fois la distance Terre-Soleil, NDLR)», explique Nicolas Biver, spécialiste des comètes à l'Observatoire de Paris. «Elles sont fragiles et difficiles à repérer longtemps avant leur passage près du Soleil.»
 

Sur Terre, Siding Spring sera peut-être observable à la jumelle, à côté de Mars, mais seulement dans l'hémisphère sud. Dans l'hémisphère nord, Mars est trop près de l'horizon en ce moment pour permettre des observations correctes, même avec un matériel plus sophistiqué.
 

Curiosity aux premières loges

 

Les rovers martiens Curiosity et Opportunity seront eux aux premières loges. Malheureusement, il fera jour sur Mars lorsque Siding Spring sera au plus près, ce qui n'assure pas des observations au sol de grande qualité. «Mais on ne sait jamais avec les comètes», rappelle François Forget, spécialiste de l'atmosphère martienne à l'université Paris 6. Une pluie de météores liés à la désintégration de poussières dans l'atmosphère en soirée n'est pas tout à fait exclue.
 

«Ce qui est sûr, c'est que Mars traversera les gaz, invisibles à l'œil nu, éjectés par la comète. On pourra donc voir comment l'atmosphère de Mars va réagir lorsqu'elle sera percutée de plein fouet par ce flux d'atomes.» Les modèles prévoient dans la haute atmosphère (plus de 140 km d'altitude) une augmentation de la température de plus de 100°C et des taux d'hydrogène plus de 40 fois supérieures à la normale pendant plusieurs heures.
 

«C'est une véritable expérience échelle 1 à laquelle on va assister», se réjouit le spécialiste de l'atmosphère martienne.
 

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