Terrorisme : Nicolas Sarkozy propose de rétablir la Cour de sûreté de l'État mise en place par De Gaulle

By Rédaction en ligne août 29, 2016 597

ÉCLAIRAGE - Comme Bruno Le Maire, Nicolas Sarkozy fait le pari de la justice d'exception pour contrer la menace terroriste.

Après les attentats d'ampleur de Paris, Nice et Saint-Étienne-du-Rouvray, le combat contre le terrorisme mais aussi sa prévention seront des thématiques au cœur de la campagne présidentielle. Les candidats dégainent tous leurs propositions. La dernière en date est signée Nicolas Sarkozy. Invité de RTL ce lundi 29 août, le candidat à la primaire Les Républicains "croit à la nécessité de créer les conditions pour une cour spéciale pour le terrorisme".

Pour illustrer sa proposition, l'ancien chef de l'État prend l'exemple de l'attentat de Saint-Étienne-du-Rouvray. "Un individu de 19 ans, qui a fait une tentative de départ pour le jihad et qui a égorgé un malheureux prêtre de 84 ans. Il est passé devant un juge qui n'avait jamais vu un terroriste, qui n'était pas spécialisé pour cela et qui a traité cet assassin comme un délinquant 'du quotidien'. Alors que c'était déjà quelqu'un d'engagé dans la radicalité." Le candidat est par ailleurs favorable à la formation de magistrats spécialisés.

Nicolas Sarkozy a déjà trouvé un nom à cette cour spéciale : la Cour de sûreté terroriste, qu'il compare à la Cour spéciale mise en place par le général de Gaulle à l'époque des attentats commis par l'Organisation de l'armée secrète, l'OAS. Dans la même veine, Bruno Le Maire fait lui aussi la promotion de la justice d'exception face à la menace terroriste. Il souhaite interner préventivement les fichés S français - plusieurs centaines de personnes - dans des centres de détention sous le contrôle des juges" et balaye les arguments de l'État de droit et de la présomption d'innocence : "Un État de droit qui ne garantit pas la protection des Français, ce n'est pas un État de droit."

 

Une juridiction d'exception pour contrer l'OAS dans les années 1960

Comme l'a souligné Nicolas Sarkozy, Charles de Gaulle avait instauré une juridiction d'exception le 27 avril 1961 : un Haut tribunal militaire réservé aux "auteurs et complices des crimes et délits contre la sûreté de l'État et contre la discipline des armées ainsi que les infractions connexes, commis en relation avec les événements d'Algérie, peuvent être déférés par décret au Haut tribunal militaire lorsque ces crimes et délits auront été commis avant la fin de la période d'exercice des pouvoirs exceptionnels."

Cette tentative s'est finalement soldée par un échec. Deux ans plus tard, en 1963, le Haut tribunal militaire est supplanté par une juridiction d'exception, la Cour de sûreté de l'État, dont le but était de "juger les personnes accusées de porter atteinte à la sûreté intérieure et extérieure de l'État, comme l'espionnage et le terrorisme".

"La Cour de sûreté de l’État a prononcé une trentaine de condamnations à mort contre des membres de l’OAS et des 'espions soviétiques', mais aussi des collaborateurs qui avaient fui la France à la Libération et dont les peines n’ont jamais été appliquées en raison des grâces présidentielles ou des amnisties", explique Vanessa Codaccioni, maîtresse de conférences au département de science politique de Paris 8. Robert Badinter, alors ministre de la Justice, supprime cette juridiction dans une loi, le 4 août 1981.

Une Cour d'assises spéciale depuis 1982

La Cour de sûreté de l'État est remplacée en 1982 par la Cour d'assises spéciale. Compétente en matière criminelle pour les affaires de terrorisme quatre ans plus tard en 1986, cette juridiction, exception dans le droit français, a été créée après les attentats qui avaient touché la France (fusillade de l'avenue Trudaine en 1983, assassinat de deux diplomates américain et israélien à en 1982 et du consul américain à Strasbourg en 1984).

La Cour d'assises spéciale, composée de 7 magistrats professionnels en première instance et 9 en appel, a également jugé Yvan Colonna, assassin du préfet Érignac, en 2007. "La Cour d’assises spéciale juge un peu moins d’une dizaine d’affaires par an. Chaque audience dure au moins 5 jours et peut se prolonger jusqu’à six semaines en fonction de la complexité de l’affaire et du nombre d’accusés jugés", expliquait Ulrika Weiss, substitut général auprès de la Cour d'appel de Paris sur le site du ministère de la Justice.

 

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