Facebook, l'autre terrain où s'affrontent Trump et Clinton

By Rédaction en ligne septembre 27, 2016 1609

Jamais n'ont fait campagne autant de sites de propagande conçus pour les réseaux sociaux.

 

Les deux tiers des Américains s'informent sur ces réseaux : c'est 50 % de plus qu'en 2012.

Début mars, les employés de Facebook ont ouvertement posé la question lors d'une réunion interne : «  Facebook doit-il empêcher Trump de gagner ? » Même si Mark Zuckerberg ne cache pas tout le mal qu'il pense du candidat républicain à l'élection présidentielle américaine, le plus grand réseau social du monde s'est toujours défendu de faire de la politique. Un voeu pieux : cette année, pour la première fois, un pan entier de la campagne électorale s'est déroulé presque exclusivement sur Facebook.

Selon le Pew Research Center, les deux tiers des Américains s'informent désormais sur les réseaux sociaux, contre moins de la moitié il y a quatre ans. Pour l'écrasante majorité d'entre eux, Facebook est l'outil de prédilection. Mais ce qui était en 2012 un moyen pour les candidats de cibler plus efficacement les électeurs est devenu, quatre ans plus tard, une terre de campagne en tant que telle, avec ses débats, son public et sa propre actualité, alimentée par une profusion de pages de propagande conçues exclusivement pour elle. Baptisées « Occupy Democrats », « Make America Great » ou « The Angry Patriot », elles prospèrent sur la théorie du complot avec quelques thèmes de prédilection : les mensonges prétendus d'Hillary, la progression de l'Etat islamique, le mouvement Black Lives Matter (supposé raciste) ou les manoeuvres démocrates destinées à étouffer Bernie Sanders. Certaines rivalisent sans difficulté avec les médias traditionnels : la page d'obédience démocrate « The Other 98 % » affiche plus de 2,7 millions d'abonnés, tandis que la républicaine « RightAlerts » en compte près de 1,5 million, soit autant que la chaîne de télévision MSNBC.

 

La fiabilité compte peu

Bien qu'ouvertement partisanes, ces pages sont parvenues ces derniers mois à toucher un public plus vaste que les simples militants, en migrant sur le fil d'information de Facebook. La méthode est toujours la même : un titre racoleur (« Aucun média ne vous raconte l'histoire de ce musulman qui a attaqué Trump », « Comment le Parti démocrate a fait taire les partisans de Bernie », « Les Clinton ont fait bien pire que voler du mobilier en quittant la Maison-Blanche »...), incitant les abonnés à cliquer, mais surtout à diffuser l'information autour d'eux pour la sortir du seul cercle des supporters acquis à la cause.

Si la sauce prend, les médias embraient, voire l'entourage du candidat. Rudolf Giuliani, proche de Trump, fut ainsi l'un des premiers à inciter les électeurs à regarder les vidéos catastrophistes sur la santé de Hillary Clinton. La fiabilité de l'information compte peu : une équipe de l'université de l'Indiana a montré que les articles comportant de fausses informations étaient « partagés » aussi souvent que ceux fondés sur des faits. En clair, « il n'y a aucun avantage à fournir une information fiable », conclut l'un des auteurs de l'étude.

 

Fournir de la contradiction

L'influence de ces pages et leur impact sur les électeurs commencent à susciter des inquiétudes. Le « Wall Street Journal » a ainsi lancé avant l'été un outil visant à fournir de la contradiction aux utilisateurs des réseaux sociaux. Baptisé « Blue Feed, Red Feed », celui-ci met face à face, couleurs à l'appui, les deux fils de propagande. «  Facebook est en train de remplacer le bon vieux kiosque à journaux où on trouvait côte à côte la couverture de "Forbes" et celle de "Rolling Stone", a expliqué le quotidien en présentant son nouvel outil. Cette expérience est très difficile à reproduire sur Facebook. » L'algorithme qui fait tourner le fil d'information choisit en effet en priorité des contenus semblables à ceux que l'utilisateur a « aimé » dans le passé, fonctionnant donc en vase clos.

Reste à voir dans quelle mesure les réseaux sociaux, qui ont constitué un formidable porte-voix pour des candidats anti-establishment comme Bernie Sanders ou Donald Trump, pèseront sur l'issue du scrutin le 8 novembre. S'il perd, Trump accusera certainement le système d'être « totalement verrouillé ». Une idée fort répandue sur les réseaux sociaux.

 

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