touwensa.com هي بوابة إخبارية على الإنترنت ومصدر دائم للمحتوى التقني والرقمي لجمهورها المؤثر في جميع أنحاء العالم. يمكنك الوصول إلينا عبر البريد الإلكتروني أو الهاتف.
editor@touwensa.com
Le tourisme tunisien étouffe depuis plus de vingt ans sous le poids d’une dette interminable. Malgré toutes les sommes remboursées aux banques, le compteur de la dette ne s’arrête pas de tourner. Une situation qui a pour cause les pratiques abusives et les conditions d’emprunt importantes du système bancaire. Aujourd’hui, des dizaines d’hôtels sont menacés de disparition à cause de leur endettement, mais également à cause d’un projet de loi, non approuvé encore, qui donne des supers pouvoirs à la SGA, une société de gestion d’actifs. Pour secourir les hôteliers endettés, la ministre du Tourisme, Amel Karboul, sollicite l’intervention du gouverneur de la banque centrale.
Un climat d’anxiété et de flou règne sur le secteur hôtelier depuis que la création de la Société de Gestion d’Actifs (SGA) fut décidée lors d’un conseil ministériel. Il s’agit, en effet, d’une société chargée d’acheter les actifs des hôtels endettés avec la possibilité de les revendre, plus tard, à une tierce entreprise qui ne serait pas forcement tunisienne ni à vocation touristique. A l’heure actuelle, la SGA n’existe pas et la loi sur création demeure encore un projet.
Le nom de la SGA a surgi de manière officielle dans le projet de loi de Finances complémentaire 2014. Sa création était décidée en s’appuyant sur une étude menée par la banque mondiale qui indique que les dettes hôtelières représentent une partie majeure des créances bancaires et que, par conséquent, le remboursement des ces dettes ou d’une partie aidera à compenser le manque de liquidité dont souffrent aujourd’hui les banques. Jusque-là tout semble bien cohérent et logique. Mais, ceci n’est pas l’avis des professionnels du tourisme qui voient la question d’un œil tout à fait différent.
D’après les hôteliers, le projet de loi sur la SGA recèle plusieurs vices et aberrations. Le texte de loi tel que présenté attribue, en effet, à ladite société des pouvoirs étendus au détriment des intérêts du secteur et des salariés qui y travaillent. Explication. Une fois qu’elle a racheté la dette, la SGA pourra faire ce que bon lui semble. Elle pourra, ainsi, s’autoriser, en cas de désaccord avec le propriétaire insolvable, de confisquer l’entreprise, confier sa gestion à une tierce société ou de la vendre carrément au gestionnaire qu’elle avait préalablement désigné, et ce, sans que le propriétaire ne puisse, à aucun moment, exercer son droit de recours auprès de la Justice.
Par ailleurs, l’acheteur est libre, faute de loi protégeant le statut hôtelier du bien acquis, d’en faire ce qui lui plaira. Il pourra, par exemple, raser l’hôtel en toute tranquillité et ériger, à la place, des immeubles d’habitation. Dans des cas similaires, les plus lésés sont les employés, car à cause de tels choix, ils se retrouvent acculés au chômage.
Autre reproche des hôteliers, c’est que ladite loi ne garantit pas le droit de préemption. Un droit qui permet d’avoir la priorité sur l’achat de la dette au même prix que celui proposé à la SGA.
Les dettes du secteur touristique remontent à plus de vingt ans. Selon le système bancaire, les crédits encours des hôtels et restaurants s’élèvent à 3 411 millions de dinars, chiffre arrêté au 31 décembre 2010. Soit 7,9 % des crédits en cours de l’ensemble de l’économie. Ces chiffres laissent à se demander pourquoi le secteur souffre d’un endettement si chronique ? Certains experts sont revenus sur la question en vue d’y apporter une réponse détaillée.
Dans leur constat, ces experts pointent les pratiques usuraires des banques prêteuses. Le taux d’intérêt appliqué est à la fois excessif et non conforme aux dispositions de la BCT. Entre 1988 et 1996, ce taux s’élevait à 15% permettant aux banques de dégager une marge égale à 6,97% alors que la marge maximale autorisée par la circulaire de la BCT n° 87-47 était fixée à 3%.
La deuxième irrégularité relevée concerne la perception d’avances des intérêts conventionnels. Cette pratique est considérée, aux yeux de l’article 35 de la circulaire de la BCT n° 91-22, comme une infraction. Ainsi, ladite circulaire stipule que les intérêts des crédits à long terme sont payables à terme échu et décomptés à partir de la date à laquelle le compte du bénéficiaire a été crédité.
La capitalisation des intérêts a pour sa part aggravé la situation des hôteliers en augmentant de manière exponentielle leurs charges d’emprunt. A défaut de paiement à l’échéance, l’hôtelier se retrouve, outre la dette principale et les intérêts de retard y afférents, face à de nouveaux intérêts de retard appliqués aux intérêts. Autrement dit, ces derniers deviennent eux-mêmes productifs d’intérêts. Jusqu’en juin 2000, cette capitalisation était interdite par le Code des obligations et des contrats (COC). Sur le plan financier, cela se traduit par une surfacturation irrégulière d’intérêts estimée à 50% des intérêts facturés par les banques avant l’amendement de l’article en 2000, soit 1 014,2 millions de dinars.
La quatrième irrégularité soulevée concerne le respect de l’annualité des taux d’intérêt. Le COC dispose dans son article 1098 : « Les intérêts ne peuvent être calculés que sur la taxe d'une année entière. En matière commerciale, ils peuvent être calculés au mois». En vertu de cet article, les banques sont dans l’obligation d’appliquer un taux dit « Taux équivalent » si le remboursement est effectué sur la base de périodes inférieures à une année (semestrielle, trimestrielle ou mensuelle). Ce taux permet, en effet, d’obtenir l’égalité entre l’intérêt capitalisé des échéances payables au cours de l’année et le montant obtenu par un paiement unique à la fin de l’année. Une disposition qui, selon certains experts, n’a jamais été respectée.
L’indexation du taux d’intérêt fait quant à elle l’objet d’un traitement préjudiciable pour les hôteliers. En effet, Les taux d’intérêt appliqués par les banques sont soit fixes soit indexés. Dans le cas de taux indexés, les intérêts doivent être corrigés compte tenu de la variation du taux de base. (TMM ou taux d’intérêt des emprunts contractés auprès des institutions financières internationales). Au cours de la période allant de 1989 à 2011, le TMM a baissé de 10% à 3.16%. Une baisse accompagnée d’une diminution du de 10,1% à 1,3%, entre les années 1989 et 2003.
Ces baisses n’ont pas été systématiquement répercutées sur les taux appliqués sur les créances impayées ce qui a augmenté illégalement les encours des crédits.
La ministre du Tourisme, Amel Karboul, a adressé en date du 10 octobre 2014 une correspondance à Chedly Ayari, gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, traitant de l’endettement des entreprises touristiques. Business News a obtenu une copie de cette lettre.
Dans sa lettre, la ministre attire l’attention du gouverneur de la BCT sur la nécessité de résoudre le problème de l’endettement. Un problème qui, selon elle, entrave le développement du secteur et ralentit sa croissance. La taille actuelle de l’endettement pèse lourdement sur les hôteliers et contraste avec les ambitions du ministère. « On ambitionne d’atteindre 12 millions de visiteurs et une contribution de 12% dans le PIB à l’horizon 2012 » a-t-elle écrit.
Mme Karboul propose, en guise d’issue à ce mal qui ronge le secteur, de revoir les procédures et les règles bancaires en vigueur, notamment celles régissant les imputations des montants payées par leurs débiteurs, rappelant, à cet effet les dispositions de l’article 343 du COC, avant de faire remarquer que cette disposition juridique n’est pas respectée par les banques. La ministre demande, ainsi, au gouverneur de la BCT d’inviter les banques à « se conformer strictement à l’esprit de cet article en imputant systématiquement les paiements comme remboursement du principal de la dette en priorité et éviter ainsi de surcharger les entreprises par des frais financiers ».
Error: No articles to display