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Le carnaval de Rio a l’air presque parfait. Sous le soleil écrasant de l’été austral, les somptueuses parades se donnent à guichets fermés et les « blocos », ces défilés de quartier, n’en finissent pas d’investir les rues. La décisive année 2014 du Brésil semble enfin prendre corps et trouver son rythme. Après Ronaldo à Sao Paulo ce week-end, même la légende vivante du ballon rond Zico s’apprête à monter sur un char construit en son honneur dans le sambodrome carioca, aux premières heures du mardi 4 mars qui marquera le décompte officiel des cent derniers jours avant le coup d’envoi de la Coupe du monde.
Football, samba et Malandro, la figure populaire du voyou débrouillard, enfin réunis comme le veut l’imaginaire national. Avec la plus grande des fêtes brésiliennes en ligne de mire. Et pourtant, en bordure des défilés, le pays renvoie l’image d’une tension sourde, prêt à laisser exprimer sa colère.
« Oui au carnaval, non au Mondial », peut-on lire sur des pancartes. Dans le centre-ville, des chants parodient les « marchinhas », ces refrains populaires de la fête, pour se moquer des édiles et rappeler les épisodes et les suites de la fronde sociale de juin 2013. Les textes sont distribués à la main, repris sur les réseaux sociaux.
DÉPENSES FARAMINEUSES
Cette tension est montée d’un cran lors de du show de Preta Gil, la fille du célèbre Gilberto Gil. Devant une rixe de jeunes, la chanteuse a menacé de quitter les lieux en lâchant : « Vous êtes les mêmes que ceux qui ont provoqué la mort de Santiago [Andrade] », ce cameraman mortellement blessé par une fusée d’artifice lancée par un manifestant pendant un rassemblement, le 6 février, contre la hausse du prix des tickets d’autobus. Une revendication identique à celle qui avait mis le feu aux poudres au mois de juin, en pleine Coupe des confédérations, et qui avait fait surgir une foultitude de réactions contre la corruption, l’indigence des services publics et les dépenses faramineuses consacrées au Mondial.
De fait, jamais le nombre de policiers militaires déployés dans les rues n’avait atteint une telle dimension dans l’histoire du Carnaval ouvert depuis vendredi 28 février. A Rio, quelque 17 000 hommes ont été mobilisés. Ils seront 50 000 pendant la Coupe du monde, plus de 100 000 ailleurs dans le pays. Des unités formées aux sports de combats sont également prévues. L’armée aussi sera là, en couverture, avec 57 000 soldats.
Un arsenal répressif qui s’apprête à être renforcé avec un texte de loi « anti-terroriste », interdisant de participer à une manifestation le visage masqué, comme le font les militants des Black blocs depuis des mois. Au cours des deux dernières manifestations contre la Coupe du monde, la police a arrêté 397 personnes, plus que le total des arrestations réalisées sur l’ensemble de l’année 2013.
52 % DES BRÉSILIENS SE DISENT FAVORABLES AU MONDIAL
Autant de mesures au goût amer. D’un côté, le soutien massif de la population aux manifestations, observé durant les premiers mois du soulèvement populaire, s’est érodé de 81 % à 52 % ces dernières semaines. De l’autre, jamais le taux de soutien à la Coupe du monde n’a été aussi bas. Pour la première fois, seuls 52 % des Brésiliens se disent favorables au Mondial. Ils étaient 79 % en novembre. Selon l’institut Datafolha, même les segments de la population les plus férus de compétition footballistique sont touchés. Comme si la Copa était devenue une chambre d’échos de tous les maux du pays. Etrange paradoxe au pays du ballon rond.
« Imagina na copa » s’imprime sur les T-shirts. « Imagine cela durant la Coupe du monde » est devenu une des rengaines préférées des Brésiliens pour exprimer leur lassitude devant les attentes et les retards qui s’accumuleront même après le coup d’envoi.
A cent jours, le coût total du Mondial atteint plus de 10 milliards d’euros, soit près du double du budget initial. C’est beaucoup pour un pays qui a du mal à fournir des services publics de base. Beaucoup pour certains stades considérés comme de futurs éléphants blancs en raison de l’absence chronique d’équipes locales capables de remplir de telles enceintes.
5 STADES SUR 12 TOUJOURS EN TRAVAUX
La liste des projets visant à améliorer la mobilité urbaine s’est, elle, réduite tout au long des mois. Le budget pour les infrastructures de transports liées au Mondial a été diminué d’un tiers. Pas étonnant que plus de 75 % des Brésiliens désapprouvent les investissements publics consacrés au Mondial. Et que dire des cinq stades sur douze toujours en travaux ? Ils devaient être prêts fin décembre.
De quoi susciter la panique au sein de la Fédération internationale de football (FIFA). En janvier, son président Sepp Blatter a dit que le Brésil était le pays le plus en retard depuis qu’il a rejoint la FIFA en 1975, alors que le pays est le seul à avoir disposé de sept ans pour se préparer. Au cours des dernières semaines, trois enceintes – Porto Alegre, Curitiba et Sao Paulo – ont frôlé, pour des raisons diverses, une suspension.
A ce cocktail est venue s’ajouter une recrudescence des violences « ordinaires ». Malgré les opérations des unités policières de pacifications (UPP) dans une trentaine de favelas, soutenues à grands renforts de couverture médiatique, l’Etat de Rio a connu une poussée de près de 17 % à 25 % des homicides en 2013, selon les sources, après trois années de baisse. La cité carioca enregistre même une augmentation de 33 % en fin d’année. Ailleurs dans le pays, les morts violentes ont connu une inflation de plus de 10 %. Parfois plus dans certains Etats du nord-est.
C’est dans ce contexte que les autorités des villes hôtes de la Coupe du monde ont cherché ces derniers temps à réduire les coûts des festivités liées à la compétition. Une façon de garder certaines distances avec d’éventuelles manifestations qui tourneraient mal ou de nouvelles accusations de gabegies financières.
La ville de Recife vient d’annoncer qu’elle ne participerait pas aux Fan Fests, ces shows publics avec retransmissions lancés en Allemagne, lors de la Coupe du monde 2006. Brasilia a préféré déplacer la fête loin du centre de la capitale comme prévu initialement. Porto Alegre prendrait le même chemin. A Rio, les organisateurs ont déclaré ne pas avoir encore décidé avec la FIFA si un tel déploiement aura lieu et à quel prix. Il reste cent jours et le carnaval bat son plein.
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