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Tabarka : Touwensa – Ali ZOUAOUI
Sous l'égide de la Maison de la Culture de Tabarka, le Club: Aklem Khémir a eu lieu la deuxième organisation de la manifestation littéraire: «Livre et Editeur ». Ce rendez-vous convivial s'est particulièrement intéressé aux caractéristiques/spécificités du Roman Tunisien Contemporain. Cette manifestation qui a eu lieu, les 21, 22 et 23 courants a montré à suffisance, la soif inassouvie du public et son désir incompressible d'entretenir des liens indéfectibles avec le livre.
Le coup d'envoi a été marqué par la parole donnée aux invités de marque qui ont fait le déplacement de Tunis. Et il faut bien le dire, le jeu en a valu la chandelle. Il s'agissait de Messieurs : Moncef Chebbi, Mohamed Bouammoud et François-G Bussac. Le premier a présenté son Roman intitulé: Soliman Al Hrairi - Editions Arabesques-Tunis 2013. Le second a exposé les traits de l’héroïne de son œuvre: Essayda El Mannoubyya, de la même Maison d'Editions, avec laquelle, il a remporté le deuxième prix découverte au Comar d'Or-Avril 2009. Et le troisième a parlé de son Roman: Le Cousin, également édité par la Maison Arabesques.
De prime abord, monsieur Chebbi; en sa qualité de Directeur Général des Editions Arabesques, a dressé un tableau encourageant et optimiste, pour ce qui est de l'afflux des auteurs à l'issue de la révolution. Comme si la peur était vaincue et les carcans étaient brisés après le 17 Janvier 2011. Cet exorcisme, pour ne pas dire affranchissement, s'est répercuté sur l'élite tunisienne lettrée. La quantité ainsi que la qualité de l'écriture ont réalisé une avancée spectaculaire. De 1.500, on est passés à 2.200 livres par an. Et dans le même sillage, il a salué la percée de la femme tunisienne qui commence à se frayer un passage dans ce domaine. Pour lui, la matrice intellectuelle et culturelle est une grande gageure pour la réalisation des objectifs du Printemps Arabe.
Mais en ce qui concerne son œuvre, on peut dire que Soliman AL Harairi, cet orphelin de la moitié des années 30 du 19 Siècle, en dépit de la précarité de sa situation, a décroché le diplôme de Notaire et a appris la langue française grâce aux pères blancs qui lui ont ouvert leurs girons. Il fut presque adopté par ces chrétiens. C'est ce qui va expliquer le sort qui lui a été réservé par les Cheikhs de la Zitouna, qui s'évertuèrent à le river au silence et à le mettre sur le pilori. Ils le considèrent comme un paria ou un pestiféré, à mettre sur le banc de la Société. Pour eux, il s'agit d'un anticonformiste, occidentalisé jusqu'au trognon, qui se distingua par un accoutrement différent au leur. Il fut l'objet d'une machination qui poussa le Bey à le révoquer de sa fonction de Notaire. Il vécut sous le boisseau et fut sauvé par le l'abbé François Bourgade, venu d'Alger. Ce Révérend missionnaire l'a pris avec lui en France. Et sous le ciel parisien, Souleimen El Harairi, entre autres, a eu la chance insigne de traduire trois livres intitulés: Les Soirées de Carthage, les clés du Coran et du Coran à l'Evangile. Il participa aux joutes compilées dans le Journal: Birgys Baris ou L'Aigle de Paris, qui prêcha la tolérance, le dialogue entre les Religions et le respect des minorités. Questions d'actualité, que tout cela! Non? Enfin, il se référa au voyage de l'Emir Abdelkader à Damas.
Quant à Monsieur M. Bouamoud, il a retracé son itinéraire et ses balbutiements dans le monde de l'écriture, avant de s'affirmer. Il a mis en relief les tribulations de Essayda El Mannoubyya, cette femme sainte qui naquit au 13 ème Siècle et vécut 76 ans. Elle aurait rencontré l'Emir Abou Zakaria Yahya El Hafsi et a lu le Saint Coran 1.500 fois. Un personnage énigmatique qui s'entacha de l'aura soufie de Belhassen Echedli. Une femme qui fut vouée aux gémonies et qu'on a considérée, au début, comme une dévergondée, de mœurs légères. On qualifia sa conduite de licencieuse et on médit d'elle. Elle fut l'objet de commérages et d'invectives acerbes, jusqu'au jour où elle apporta la preuve de sa sainteté. Comme disait Nietzsche: «Il faut avoir du chaos en soi pour pouvoir enfanter une étoile qui danse. Cette œuvre n'est pas un récit historique qui repose sur des faits avérés. C'est plutôt une fiction. Cette sainte dont la tombe a été profanée au troisième millénaire, dans une Tunisie post-révolutionnaire.
Notre troisième invité, amoureux de la Tunisie, monsieur Bussac, a parlé du Roman Tunisien qu'il a qualifié de discret, d'intime et de prometteur. Il a plaidé pour la place des romanciers tunisiens, à l'instar de leurs paires algériens et marocains. A ses yeux, le Roman tunisien retrace, pour ainsi dire, les destins angoissés. Il met en évidence les fêlures sociales/régionales. Il dépeint le mépris et parle, au passage, des questions religieuses délicates, avec ce qu'elles sous entendent comme un clivage douloureux de croyance/mécréance. Aussi a t-il parlé de son expérience et de sa découverte de la Tunisie grâce au legs des Mémoires de son grand-père qui fut minier au Sud Tunisien au 19 siècle. Ces Mémoires qui ont engendré son livre:" Le Jardinier de Metlaoui". Ce premier jour était aussi l'occasion de présenter un exposé sur le Roman que j'ai moi-même présenté.
Le deuxième jour était consacré à une rencontre avec les étudiants diplômés, encadrés par l'association Oxygène. Ces jeunes ont eu une interaction du tonnerre avec nos trois invités et ont fait preuve de sérieux, d'assiduité et de suite dans les idées. Leurs questions étaient tant percutantes que pertinentes. Ensuite, de sa voix rauque et porteuse, monsieur Bussac, a donné lecture de quelques passages du fruit de ses entrailles: Le Cousin. Sur ces entrefaites, un débat fort intéressant a eu lieu où les thèmes de ce livre ont été minutieusement décortiqués. Inutile de m'attarder sur la générosité de cette Association, malgré ses ressources rudimentaires. Puis dans l'après-midi, une rencontre a eu lieu avec les élèves du Bac Lettres, du Lycée 2 Mars 1934. Ils ont été très actifs et surtout réceptifs. Leurs questions témoignaient de l'intérêt qu'ils portent à la Littérature. Là, aussi ils ont eu droit à une lecture à haute voix, dirigée par l'auteur du" Cousin".
Enfin la clôture en apothéose, comme l'a dit si bien Si Mokhtar Triki, a eu lieu à l'Ecole Primaire de Melloula. Les élèves mignons, étaient d'un éveil sidérant. Nous avons assisté à une petite pièce de théâtre, savamment et spontanément joué par trois élèves, sous le regard bienveillant de leur directeur et enseignant, monsieur Ezzeddine Hémissi qui a fait un parcours sans faute. De surcroît, il a réservé à ses hôtes un accueil inoubliable, sans chichi. Mais digne d'un directeur et d'un maître respectueux. En outre, il applique à merveille la devise: « L'enfant est le père de l'homme ».
Nous étions tous émus lorsque ses bourgeons se sont drapés dans le drapeau de notre cher pays et ont chanté en chœur une chanson patriotique, quelques jours après que cet étendard fut lâchement brûlé, suite à une rencontre de foot- ball, sous d'autres cieux.
Ali ZOUAOUI (Tabarka)
Les à-côtés de la manifestation :
=Un dîner convivial a eu lieu à l’hôtel de résidence des hôtes de Tabarka où se mêlaient lecture à haute voix par l’auteur du « Cousin », François. G- Bussac, chant et musique jouée par le duo de l’association « Art et Festivals », Anis Chaabni et Tarek Jemaï.
=Comme à l’accoutumé de chaque rencontre, M. Moncef Chebbi, propriétaire des éditions « Arabesques » n’a pas manqué d’offrir un joli cadeau pour enrichir le fond de la Bibliothèque publique de la Cité du Corail avec en sommes quelques quatre cent livres. Nos remerciements à cet homme à cœur vaillant.
=Contrairement au vieux lycée 2 mars 1934, très dégradé et mal entretenu, l’école primaire de Melloula était d’une beauté extraordinaire par sa propreté, ses fleurs, et surtout son ambiance. Toutes nos félicitations à M. Ezzedine Hmissi, son directeur, omniprésent.
= « Oxygène », l’association gérée par notre ami photographe, n’a laissé aucune faille durant ces trois jours et a bien orchestré ses stagiaires afin de réussir l’évènement.
=le groupe de réflexion de l’association « Oxygène » a brillé de mille éclats par sa présence ponctuelle, les présentations des invités d’une manière très éloquente, les discussions rehaussées au niveau de l’excellence et les reportages phots / vidéo pour les archives. Que veut-on de mieux ?
Mokhtar TRIKI
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