Si l’action se passe dans un théâtre, le véritable sujet n’est pas le théâtre, mais la vie avec ses joies, ses frustrations, ses rancœurs, ses folies, ses cabotinages, ses générosités, dans un décor simple, deux héroïnes somptueuses et un jeune talentueux comédien, font de ce chef-d’œuvre de Genet un enchantement. Le coup de génie, c’est d’avoir rassemblé une dame bourgeoise et deux bonnes sur le même plateau : L’une dans l’éclat d’une liberté sûre d’elle, les autres d’une sûreté pleine de finesse dans la peau d’un couple qui veut tout faire.
 

Parfaitement « dressés » par Hayet Othmen, Samira Msikh et Sabeur Sassi interprètent brillamment cette pièce d’une formidable drôlerie qui frise parfois délicieusement l’absurde et le théâtre de la Basilique frétille de satisfaction car il s’agit d’une comédie sociale d’aujourd’hui, légère et caustique.
 

En effet Bona et Boni, un couple travaillant chez une dame bourgeoise appelée Banana. Le couple a vu de toutes les couleurs suite au comportement hostile de la dame envers eux. Ils ont pris la décision de bouleverser le rythme de vie dans ce foyer devenu infernal. Ils ont pensé même à l’exécuter mais ils n’arrivent pas. Après beaucoup de réflexions, ils ont décidé de se révolter contre l’injustice et cette fois-ci réussissent devant la stupéfaction de la dame bourgeoise.
 

Les rires volent en éclats dans tout le théâtre. Tout le monde se laisse prendre. Il faut dire que la mise en scène de Hayet Othmen, énergique et survolée, est irrésistible. Et si les comédiens connaissent leurs moments de bravoure, la prestation de Sabeur Sassi et Samira Msikh est épatante.
 

Enorme passion à la Basilique. On est captivé de bout en bout par cette pièce magistralement interprétée, avec une justesse et une sobriété qui en magnifient la portée. C’est un spectacle rare, vecteur d’émotions fortes, qui réconcilie les jeunes et les adultes avec le théâtre. Un théâtre citoyen qui, tout à la fois, divertit et mène à la réflexion. Un spectacle populaire qui dénonce le rejet de l’autre dans sa différence, le machisme, le racisme. Une œuvre profondément humaine et actuelle, car pour Genet, si deux hommes cherchent à se comprendre, ils seront forcément bons l’un envers l’autre.