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Touwensa (Agences) Mokhtar TRIKI
AVIS D'EXPERT - S'installer à la campagne pour préserver le capital santé des plus petits n'est pas vraiment une bonne option, selon le Dr Bertrand Delaisi, pneumopédiatre à l'Hôpital Robert-Debré (Paris) et secrétaire général adjoint de la Société française de pédiatrie (SFP).
Fuir loin de la ville. Tel est sans doute le désir qui a envahi de nombreux parents - et surtout ceux résidant à Paris - au mois d'avril 2014. Il faut dire que, depuis janvier, l'Île-de-France semble particulièrement irrespirable: 44 jours de dépassement du seuil d'information de pollution aux particules fines ont été comptabilisés, mettant la région en infraction avec la réglementation européenne sur l'une des stations de mesure. Vu les conséquences démontrées de cette pollution sur la santé des enfants - irritation des voies respiratoires et exacerbation des épisodes asthmatiques, risques cardio-vasculaires accrus, cancers, etc. -, tous les parents ont sans doute rêvé un instant de fuir la ville, pour une maison au bord de la mer ou en pleine campagne par exemple.
Sauf que, début avril, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a publié un rapport sur la pollution… de l'air intérieur. On y apprend notamment que, quelle que soit la localisation de leur maison ou de leur école, nos enfants y respirent souvent du benzène, des solvants, du monoxyde de carbone, du radon, lorsqu'ils n'y sont pas en plus victimes passives du tabagisme - sachant que le document ne considère qu'un petit nombre de polluants intérieurs, faute de données. Plus effrayant encore: ces polluants seraient responsables de décès d'enfants et d'adolescents. Avec toutes les précautions qui s'imposent, l'Anses suppose ainsi que 22 personnes de 0 à 19 ans auraient pu décéder de leucémies engendrées par le benzène de l'air intérieur en 2004.
Moins d'asthme en ville qu'en milieu rural
Au final, ces mêmes parents rêvant d'une maison au bord de la mer ou en pleine campagne ont sans doute songé - avec regret - que cette dernière devrait mieux être dénuée de tout confort moderne (meubles, peintures, etc.) pour respecter le capital santé de leurs enfants. La première bonne nouvelle, c'est que, pour protéger les plus jeunes, fuir la ville n'est pas la solution. Il suffit, pour s'en convaincre, d'examiner la géographie de l'asthme - la plus fréquente des maladies respiratoires chez les petits et un des sujets du congrès des sociétés françaises de pédiatrie, qui se tiendra du 22 au 24 mai à Lyon: selon une étude publiée en 2012 et portant sur les enfants en grande section de maternelle, la prévalence de l'asthme est 1,7 fois plus élevée en Basse-Normandie qu'en Île-de-France. Elle est aussi 1,3 fois plus forte en Bretagne! En cause? L'humidité, qui favorise l'apparition d'acariens, donc de réactions allergiques inflammatoires. En fait, l'asthme n'est même pas plus fréquent en milieu urbain qu'en milieu rural. Au contraire même: selon cette même étude publiée en 2012, le taux d'asthme des enfants en grande section de maternelle est de 10,4 % dans les communes rurales, soit 0,4 point de plus que dans… les villes de plus de 200.000 habitants! Il faut dire que la campagne regorge de facteurs allergisants (acariens, moisissures…)
La seconde bonne nouvelle, c'est que renoncer au confort n'est pas non plus une bonne décision. Un style de vie rustique ne garantit pas, en effet, l'absence de particules fines dans l'air - le feu de cheminée en génère par exemple - ni de dioxyde d'azote issus des produits de combustion utilisés dans la cuisine. Au final, personne, à ce jour, n'est capable de certifier qu'il est préférable, pour les enfants, d'habiter une cabane à la campagne plutôt qu'un appartement au centre de Paris.
L'équilibre entre hygiène et pollution
Certes, une option pourrait bien, a priori, permettre de renforcer les défenses des enfants contre les allergènes présents dans l'environnement: le retour au Moyen Âge. C'est-à-dire le retour à une vie complètement rurale, dans laquelle les mères boivent du lait non pasteurisé, côtoient les animaux au quotidien, voire dorment à l'étable. Seul ce mode de vie permettrait aux nouveau-nés de développer immédiatement une catégorie particulière de lymphocytes, capables de les aider à lutter efficacement contre les micro-organismes pathogènes. Mais la solution pourrait ne pas être aisée à appliquer. Surtout, elle s'accompagnerait d'un tel recul sur le front de l'hygiène qu'au final des maladies comme la listériose ou le choléra feraient plus de dégâts sur la santé des enfants que les diverses pollutions modernes.
Alors que faire? Ne certainement pas renoncer à lutter, évidemment. Car même si la France est plutôt moins mal placée que de nombreux pays en termes d'impacts visibles sur la santé des enfants - au Brésil, au Costa Rica, au Panama, au Pérou et en Uruguay, la prévalence des symptômes asthmatiques chez les enfants varie de 20 à 30 %! -, un fait demeure: l'incidence de l'asthme a doublé en Europe au cours des dix dernières années. Côté pouvoirs publics, toute action visant à réduire les niveaux de pollution sera donc appréciée par les poumons des plus jeunes. Côté parents ensuite, quelques gestes simples sont préférables au déménagement: éviter les balades à poussette et le sport lors des pics de pollution, réduire au maximum les facteurs irritants et polluants au domicile (tabac, assainissants d'air, encens, etc.) et préférez les produits de décoration (revêtements de sol, faux plafonds, etc.) classés A + ou A en matière d'émissions dans l'air intérieur. Ne pas hésiter à demander conseil au pédiatre, aussi. La bonne nouvelle, c'est qu'ils sont plus nombreux en ville qu'à la campagne…
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