Antioxydants, pesticides… le bio sort du lot

Touwensa (Agences) Mokhtar TRIKI

Si les produits issus de l'agriculture biologique contiennent moins de métaux toxiques, les chercheurs attendent désormais des études pour déterminer les effets sur la santé.

Beaucoup plus d'antioxydants et de polyphénols, beaucoup moins de résidus de pesticides, beaucoup moins de métaux toxiques et d'azote… La dernière étude publiée dans la revue British Journal of Nutrition souligne sans équivoque les atouts des céréales, fruits et légumes issus de l'agriculture biologique par rapport à ceux produits par l'agriculture conventionnelle.
 

Les données de cette étude menée par une équipe internationale de chercheurs et pilotée par le Pr Carlo Leifert, professeur d'Agriculture écologique à l'Université de Newcastle, «apporte aux consommateurs de nouvelles informations importantes par rapport à celles disponibles jusqu'à présent qui étaient contradictoires dans de nombreux cas et ont souvent été sources de confusion», souligne ce dernier.
 

L'une d'entre elle, effectuée à la demande de la FSA (Food and Safety Authority du Royaume Uni), publiée en 2009, avait fait couler beaucoup d'encre. Elle affirmait en effet que l'agriculture biologique ne présentait pas d'avantages particuliers. «Mais il s'agissait d'un travail qui analysait seulement 46 études dont certaines étaient consacrées à la viande et aux produits laitiers alors que nous en avons analysé 343, publiées dans des revues à comité de lecture et toutes consacrées à des productions végétales comparant leur composition entre les cultures issues de l'agriculture biologique et conventionnelles. En outre la moitié des travaux sur lesquels nous avons travaillés ont été rendus publiques après 2006, ils n'ont pas été pris en compte par l'analyse publiée en 2009», précise Philippe Nicot, chercheur en pathologie végétale à l'Inra et l'un des auteurs des travaux.
 

48 % de métaux toxiques en moins dans le bio.
 

L'analyse publiée dans le British Journal of Nutrition dont l'un des mérites est d'être très complète, montre en tous cas un gain moyen pour les antioxydants allant de 18 % à 69 %. Or on sait que ces composés présentent un bénéfice important en matière de santé, «notamment pour la protection contre des maladies chroniques telles que les maladies cardiovasculaires et neurodégénératives et des cancers».
 

Ils montrent ensuite que la concentration en métaux toxiques détectée dans les produits bio est plus faible que dans l'agriculture conventionnelle: en moyenne de 48 %. Enfin, ils concluent à un net avantage en matière de pesticide. Certes, l'agriculture bio n'en est pas dépourvue: les agriculteurs ont le droit d'utiliser certains produits autre que de la chimie de synthèse et les pesticides peuvent également provenir d'épandages voisins. Reste que «la fréquence de présence de pesticides détectables est quatre fois plus élevée dans les cultures conventionnelles que dans les autres», souligne encore l'étude. La situation la plus marquée concerne les fruits puisqu'ils en contiennent 7 fois plus que l'agriculture bio.
 

Encore peu d'études sur le réel impact pour la santé.
 

Les scientifiques comprennent assez facilement pourquoi il y a moins de pesticides dans le bio tout comme la quasi absence de cadmium, l'un des trois métaux très toxiques avec le plomb et le mercure qui font l'objet de recommandations européennes quant aux niveaux à ne pas dépasser. «Les agriculteurs bio excluent les engrais minéraux tel que le phosphate qui peut contenir du cadmium», explique notamment Philippe Nicot.
En revanche, il est beaucoup plus difficile d'expliquer pourquoi il y a plus d'antioxydants. «Il y a plusieurs hypothèses», précise le chercheur. «L'une d'entre elles est intuitivement satisfaisante», ajoute-t-il: les plantes bio étant beaucoup plus stressées que les cultures conventionnelles qui bénéficient de l'aide des produits phytosanitaires, elles produiraient plus d'antioxydants pour se défendre. Ces molécules font en effet partie des nombreux composés de défense des plantes. «Mais cette hypothèse ne ressort pas fortement de cette méta analyse», poursuit-il.

 

Cette question fait partie de celles auxquelles les chercheurs vont devoir répondre. «Cette étude devrait constituer un point de départ», affirme également Carlo Leifert: «nous avons montré sans l'ombre d'un doute qu'il existe des différences de composition entre les cultures biologiques et conventionnelles mais il y a maintenant un besoin urgent de réaliser des études d'intervention diététique humaine et de cohortes spécialement conçues pour identifier et quantifier les impacts sur la santé d'une transition à une alimentation biologique». Idée qui appartient aujourd'hui plus à l'intuition qu'à la science.
 

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Dernière modification le jeudi, 31 juillet 2014 12:10