Comment des abeilles peuvent sauver les éléphants et les humains

By Touwensa (Agences) Mokhtar TRIKI janvier 13, 2016 4014

Contrairement à ce que dit la fable, les éléphants n'ont pas peur des souris mais... des abeilles ! Partant de ce constat, des expériences sont menées dans plusieurs pays africains visant à utiliser les butineuses afin de réduire les conflits entre les humains et les pachydermes qui piétinent leurs cultures.

Car sous l'effet d'une forte hausse de la population et de l'extension des terres agricoles, les éléphants se retrouvent de plus en plus dans des zones d'activité humaine, pour se nourrir des cultures ou tout simplement parce qu'elles traversent leurs routes migratoires. En voulant les faire fuir avec des coups de feu, de fouet, des jets de pierre ou des pétards, le plus souvent la nuit, les fermiers et les habitants suscitent des réactions agressives des animaux, conduisant à des morts des deux côtés.

La solution pour faire cohabiter populations locales et grande faune sauvage pourrait alors résider dans des "clôtures d'abeilles" permettant de protéger les champs. En Tanzanie, un projet-pilote d'un an, lancé par l'ONG Silent Heroes Foundation, impliquée dans la protection de la faune sauvage en Afrique, est testé autour d'une ferme située dans l'aire protégée du cratère de Ngorongoro, au sud-est du célèbre parc national du Serengeti.

Le principe est ingénieux : des ruches sont installées sur des poteaux ou des arbres tous les dix mètres autour du champ et reliées entre elles par un fil. A chaque fois qu'un éléphant tente de franchir cet obstacle, il secoue les ruches et énerve les abeilles. Or, lorsqu'il entend l'insecte, il émet un grondement unique pour avertir ces congénères avant de fuir. Comme le montre la vidéo ci-dessous, la diffusion par haut-parleur de ce bruit met les pachydermes en fuite.

"Quand les éléphants perturbent une ruche, ils sont souvent piqués dans des zones sensibles, à savoir autour des yeux, au niveau de la trompe ou derrière la peau des oreilles, ce qui s'avère très douloureux, explique Hayley Adams, vétérinaire américaine et cofondatrice de Silent Heroes, qui a bénéficé fin décembre d'une subvention de 6 000 dollars de la fondation américaine Ian Somerhalder. On sait maintenant que les éléphants qui ont été piqués ont conservé la mémoire de cet événement, ce qui les pousse à ne pas s'approcher de nouveau des abeilles."

"Ce type d'approche holistique qui permet aux communautés de vivre en harmonie avec les éléphants, et de ne plus les stigmatiser, peut conduire à la préservation de l'espèce, même s'il restera toujours à résoudre la crise du braconnage pour l'ivoire", poursuit la scientifique. Cela peut également favoriser le développement d'activités telles que le tourisme, apportant ainsi un soutien économique supplémentaire."

D'autant que les "clôtures d'abeilles" sont moins coûteuses à installer que les électriques : "Cela peut varier d'un montant presque nul, si vous utilisez des ruches traditionnelles, avec des matériaux naturels, à 65 dollars par ruche, pour les plus sophistiquées, les Langstroth", précise Hayley Adams. Sans compter que le miel constitue une source de revenus supplémentaires pour les fermiers.

Cette technique est déjà employée dans d'autres pays africains, tels que le Kenya, le Botswana, l'Ouganda ou le Mozambique. Elle a été mise au point en 2008 par la scientifique britannique Lucy King, du département de zoologie de l'université d'Oxford, avec l’ONG Save the elephants qui lutte pour la protection du pachyderme. Cette chercheuse, née en Afrique et qui a effectué ses travaux au Kenya, a démontré que plus de 90 % des éléphants fuyaient lorsqu’ils entendaient le bourdonnement des abeilles. Elle a remporté, en 2011, pour ces recherches, le prix de la thèse du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE).

 

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