Des avions de moins en moins polluants

Touwensa (Agences) Mokhtar TRIKI

Les constructeurs s'engagent à réduire de 50 % les émissions de CO2.

Neuf millions en 1946. 108 millions en 1960. 1 milliard au début des années 1990. 2,9 milliards en 2012. Le cap des 3 milliards franchi un an plus tard. Et, plus de 7 milliards prévus en 2035. Le compteur du trafic aérien de passagers s'affole. Pour raisons professionnelles ou par envie de découvrir le monde, les Terriens sont de plus en plus nombreux à se presser dans les aéroports. L'accélération est sensible depuis le début des années 1990. Rien ne semble la freiner. Ni les guerres, ni les crises financières, ni la menace terroriste.
 

Cette croissance galopante est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle pour l'aéronautique. D'un côté, le dynamisme du trafic aérien (+ 4,7 % par an en moyenne) alimente le besoin en appareils et dope les carnets de commandes des avionneurs. De l'autre, le ciel est de plus en plus encombré et les aéroports saturés, avec un impact certain sur l'environnement. Avec 705 millions de tonnes de CO2 rejetées par an dans l'atmosphère, les 21.720 avions de ligne en service représentent 2 % de la production humaine de CO2 et 12 % de la pollution émise par les transports. La championne toutes catégories étant l'automobile.
 

«L'aviation ne pourra poursuivre son développement que dans le cadre d'une démarche de développement durable», souligne Vincent Garnier, directeur de la stratégie du motoriste Snecma (Groupe Safran). Airbus et Boeing consacrent 80 % et 75 % respectivement de leur budget de R & D à l'éco-efficacité qui, cela tombe bien, est synonyme d'efficacité économique.

 

L'envolée des prix du pétrole, au milieu des années 1970, a poussé l'industrie à développer des avions moins gourmands en kérosène, donc moins polluants, pour aider les compagnies à réduire la facture carburant. «Depuis le début de l'aviation commerciale, la consommation de carburant a été réduite de 50 %, grâce à l'amélioration des moteurs», insiste Vincent Garnier. Aujourd'hui, le gain est en moyenne de 1 % par an.
 

Le message de Solar Impulse
 

Les avions de nouvelle génération, porteurs de rupture technologique, permettent des améliorations plus spectaculaires. Matériaux composites légers, nouvel aérodynamisme, électrification poussée de plusieurs fonctions, nouveaux réacteurs… L'A 350, mis en service début 2015, et le 787 Dreamliner (2011) sont les plus écolos de leur catégorie. Ils promettent de réduire de 20 % à 30 % les coûts d'exploitation. C'est parce qu'ils savaient disposer du Leap (Snecma-GE) et du Pure Power (Pratt & Whitney), des réacteurs de nouvelle génération consommant 15 % de moins que leur prédécesseur, qu'Airbus a lancé l'A 320neo, une version remotorisée de son best-seller, et Boeing, le 737 Max. La réponse du marché n'a pas tardé: 6.518 appareils ont été commandés, dont 3.794 neo.
 

Mais ce n'est qu'une étape. Alors que la flotte en service double tous les quinze ans, les avions doivent préparer la transition énergétique, comme semble le rappeler le Solar Impulse, le «messager», selon le terme de Bertrand Piccard, un de ses pilotes, qui clame qu'utiliser une autre source d'énergie que le pétrole est possible.
 

Les constructeurs se sont engagés à respecter les objectifs fixés par l'Atag (Air Transport Action Group): améliorer de 1,5 % par an leur efficacité énergétique jusqu'en 2020, date à laquelle ils promettent d'atteindre la neutralité en matière d'émissions de CO2, et réduire de 50 % les émissions de CO2 d'ici à 2050. «Nous avons une approche globale. Nous devons agir sur plusieurs leviers, à court et à plus long terme», souligne Julie Felgar, directrice de la stratégie environnementale de Boeing. Le seul fait par exemple de maximiser le pilotage de l'avion peut générer une économie de 3 % à 4 % de carburant par vol. Pour tester ses innovations, Boeing a lancé un programme d'éco-démonstrateurs en 2012 avec un 737, puis en 2014 avec un 787, avec à son bord 25 technologies nouvelles, et cette année un 757, en coopération avec l'européenne TUI. Cet éco-démontrateur vole au biocarburant.
 

Carburants verts, piles à combustible, avion tout électrique, moteurs hybrides… L'aéronautique explore plusieurs voies. À moyen terme, la filière milite pour une modernisation du système de gestion du trafic aérien (Air Trafic Management ou ATM) des deux côtés de l'Atlantique. «Aujourd'hui, 8 % du carburant est gaspillé en raison d'un ATM inefficace», insiste Airbus. «Nous menons des actions afin que les gouvernements autorisent la gestion du trafic aérien par satellites», précise Julie Felgar. En confiant le suivi des vols aux satellites, les routes empruntées par les avions seraient optimisées tout comme la dernière phase du vol préparant à l'atterrissage, afin d'éviter les embouteillages au-dessus des aéroports. «L'ATM par satellite permettrait de réduire de 8 % à 10 % la consommation de carburant et d'autant les émissions polluantes, du jour au lendemain», assure Julie Felgar.
 

 

 

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