Angèle : "C'est mon ancienne baby-sitter qui m'a lancée"

Les chansons acidulées et gentiment provoc d'Angèle ont fait de la jeune Belge le phénomène musical de l’année.
 
La chanteuse tente de garder la tête froide, même si, admet-elle, elle l’a eue « un peu tiède pendant une période ». Mais c’était avant, quand elle était jeune. Aujourd’hui, elle a 23 ans. Deux mois seulement après la sortie de son premier album, « Brol », en octobre 2018, la voilà déjà disque de platine. Il faut préciser que son apprentissage a commencé quand elle avait 5 ans, par le piano. La Bruxelloise a pris l’habitude de se cacher derrière son instrument. « Jouer du classique pour faire plaisir aux grands-parents, pas de problème. Mais chanter aux repas de famille était ma phobie. C’est pour ça que j’aimais tant le piano. Je pouvais faire de la musique sans que le son vienne directement de moi. »
 
Dans sa famille, chaque membre est connu par son nom d’artiste. Marka pour le père, Laurence Bibot pour la mère. Il est chanteur, elle est comédienne. Leur fils aîné, Roméo Elvis, est devenu un rappeur majeur de la scène francophone. Angèle devait suivre leurs traces. Mais pas avec du Mozart. « Je pense qu’inconsciemment mon frère et moi avons eu besoin d’être félicités pour ce que nous faisions, nous, et pas pour ce que faisaient nos parents. »
 
Enfance sage, adolescence tranquille. Longtemps, les seuls tourments d’Angèle ont été amoureux. « J’étais une grande romantique. Mon adolescence a tourné autour des histoires d’amour. J’étais dans une passion folle. » A cette époque, elle veut travailler dans la mode. Vocation qu’elle a vite abandonnée. Comme celle de psychologue. « Trop d’études », glisse-t-elle. Le jour de son véritable déclic, elle s’en souvient. « C’était ma dernière année de lycée. J’étais avec ma mère, nous réfléchissions à l’avenir, et je pleurais comme si c’était la fin du monde, me demandant ce que j’allais faire de ma vie. Pour m’aider, maman m’a demandé ce que j’aimais faire. J’ai dit : “De la musique.’’ » Ce n’était pas plus compliqué.
 
 
Cette travailleuse acharnée a conçu son premier album en moins d’un an
 
Angèle intègre une école de jazz à Anvers. Elle commence un petit boulot d’étudiante dans un bar où tout le monde est musicien, est embauchée comme claviste sur la tournée de son père. C’est dans cette effervescence que germe la graine de star. « J’ai toujours fait beaucoup de piano, je composais déjà quelques chansons. Mais je ne pensais pas que tout cela pouvait vivre hors de ma chambre. » Elle trouve le compromis idéal : créer un compte sur le réseau social Instagram et poster des vidéos d’elle en train de chanter. Sa notoriété est d’abord virtuelle. Côté réalité, c’est moins facile. « J’ai arrêté l’école de jazz au milieu de la deuxième année, parce que j’avais l’impression de ne plus apprendre. La tournée de mon père était terminée et j’ai quitté mon job parce que le patron essayait de m’arnaquer… »
 
Une seule solution : rebondir. « Mon ancienne baby-sitter était une passionnée de musique. C’est elle qui a senti qu’il y avait quelque chose à exploiter. Et elle m’a lancée. Elle s’appelle Sylvie Farr, je l’ai rebaptisée “Sylvie-culot”. » Les deux débutantes commencent donc à programmer des concerts. « Sylvie n’avait aucun scrupule à s’engager dans des situations périlleuses. Nous avons pris de gros risques. Elle m’a programmée dans des salles de concert alors que je n’en avais jamais fait. Elle disait : “Mais bien sûr qu’elle a déjà de l’expérience !” J’avais à peine 20 ans… »
 
 
C’est compliqué d’avoir une vie amoureuse dans ce tourbillon !
Mais la magie opère. Comme si tout avait préparé la jeune fille à cette épreuve. Et la machine se met en route. Angèle commence à interpréter ses propres chansons. Le 23 octobre 2017, elle poste sur YouTube le clip de sa première composition, « La loi de Murphy ». L’accueil est retentissant. Le lendemain, son visage est sur toutes les pages d’accueil des médias en ligne. « J’ai passé la journée enfermée chez moi, je ne comprenais rien à ce qu’il se passait. Je savais que c’était un moment décisif de ma vie. » Jusque-là saluée par les professionnels, qui venaient l’écouter dans les bars de Bruxelles, et par les internautes, sa musique aborde enfin les « vraies gens », comme elle les appelle. « Plusieurs labels m’ont proposé de signer un contrat. Mais je voulais absolument garder mon projet comme je l’avais imaginé. »
 
L’obsession du contrôle, déjà. Rien ne doit sortir si ce n’est pas sa décision. Cette travailleuse acharnée a conçu son premier album en moins d’un an. Elle y chante l’amour, la jalousie, les réseaux sociaux, la célébrité. La sienne a dépassé celle de toute sa famille. « C’est un travail génial mais qui ne s’arrête jamais. Et puis la célébrité est à double tranchant. Certes, je prends encore le métro ; mais, parfois, je dois mettre des lunettes de soleil, et il m’est déjà arrivé de partir en courant, car je suis quelqu’un de très angoissé. »
 
Pour l’apaiser, il y a « mon amour », son Léo. Ex-danseur de Christine & The Queens, devenu chorégraphe et créateur de mode, il partage son existence depuis deux ans. « J’ai encore mon appartement à Bruxelles, mais quand je suis à Paris, j’habite chez lui. C’est compliqué d’avoir une vie amoureuse dans ce tourbillon ! » Surtout que Léo avait sa carrière avant qu’elle ait la sienne... A présent, son rôle se réduit parfois à celui du « copain d’Angèle ». « Souvent, c’est lui qui se retrouve à devoir me photographier avec des fans. » Pourtant, quand elle est sur scène, c’est bien Léo la vedette : l’amour, elle ne le chante que pour lui.
 
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